Elle est américaine, nouvelle égérie branchée des cafés folk new-yorkais et d’une beauté à inspirer plus d’un poète qu’elle chante. Elle, c’est Sophie Auster, « fille de »… Paul Auster comme son nom l’indique et de Siri Hustvedt, également écrivain de talent.
Agée d’à peine 18 ans (16 au moment des faits), elle a choisi de chanter les poètes français du XXe siècle (et un anonyme anglais du XVe). Mi-disque, mi livre ce bel opus nous livre de la littérature mise en musique donnée à écouter. Onze ballades romantiques aux mélodies rétro, parfois magiquement dégingandées qui nous emportent hors du temps. Outre ses propres écrits, la demoiselle s’est appropriée des textes de son paternel, d’un anonyme, et, surtout, de Robert Desnos, Tristan Tzara, Philippe Soupault, Paul Eluard et Guillaume Apollinaire (l’inévitable Pont Mirabeau, ici transformé en une comptine spectrale et gracieuse du plus bel effet). Tous anglicisés hormis ce dernier cité.
Sorti discrètement en mars aux Etats-Unis, Sophie Auster n’était jusqu’à présent disponible qu’auprès d’Urbangeekrecords, le label du groupe One Ring Zero, formé de Michael Hearst et Joshua Camp. Désormais les éditions Acte Sud (du papa Auster) en partenariat avec le label indépendant Naïve la font connaître de notre côté de l’Atlantique.
Sophie Auster parvient cependant à faire oublier son père, pourtant en grande partie à l’origine de ce projet : » One Ring Zero travaillait sur un album, As Smart as We Are (paru en France en début d’année sous le titre New York Spleen). Ils cherchaient des textes d’écrivains, raconte-t-elle au domicile de ses parents, à Brooklyn. Ils se sont notamment tournés vers mon père, qui m’a dit qu’ils manquaient d’une interprète pour un titre. Je me suis donc retrouvée dans leur studio minuscule, installé dans un sous-sol, où j’ai été pratiquement obligée de chanter accroupie, tellement le plafond était bas ! » Le duo, séduit par sa voix, décide de lui consacrer un disque entier.
La grande affaire du jour, c’est cette voix, qui impressionne par une autorité peu commune chez une si jeune fille, finalement bien mûre, peut-être parce que, en dépit de son âge, elle lit Tolstoï et les soeurs Brontë, et écoute Billie Holiday et Jimi Hendrix.
Pour l’héritage musical, Sophie Auster n’a pas hésité à mettre dans ce premier album des morceaux ouvertement country pop, comme The Sailor Girl, un des deux textes écrits par Paul Auster. Le disque n’est pas parfait, mais son imperfection n’est jamais que celle des adolescences finissantes. Déjà, elle avait fait une belle impression sur scène en juin au Cornelia Street Café, à New York, portée par une beauté évanescente d’égérie sixties. Pressentie pour apparaître dans la prochaine saison des Sopranos, elle sera par ailleurs l’une des interprètes du nouveau film de son père, The Inner Life of Martin Frost.
Sophie Auster, 1 CD Urbangeekrecords/Naïve.
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