Né sous le label littéraire Plume et plomb, le Prix du Style a vocation à distinguer pour sa qualité stylistique un livre écrit par un auteur vivant francophone paru dans l’année écoulée.
A l’origine de cette initiative originale, Antoine Buéno a d’abord souhaité pallier un manque : aucun autre Prix ne récompense explicitement la qualité artistique d’une œuvre.
Ce jeune auteur qui a déjà publié trois romans a une conception globalisante et dynamique du «style ». La forme et le fond, l’esthétique comme les idées, sont indissociables et aucune forme d’expression écrite ne doit être écartée. C’est pourquoi le jury du Prix du Style compte des célébrités aussi diverses que Frédéric Beigbeder, Denis Tillinac, Patrick Poivre d’Arvor, Jean-Michel Ribes et Olivier Delcroix.
Accueilli et doté par le Park Hyatt Paris-Vendôme, le Prix du Style 2005 a été remis le 23 novembre à Stéphane Audeguy pour son roman « La théorie des nuages ». Le lauréat a 40 ans et écrit pour « la joie de la puissance » et pour « la nécessité de ce plaisir ». Professeur d’histoire de l’art et d’histoire du cinéma, il est influencé par les auteurs de sensations anglosaxons et japonais. Il qualifie son premier livre de « roman d’aventures scientifiques » et considère que « La littérature, c’est de l’événement ».
Les autres livres en lice étaient :
Maurice G Dantec, Cosmos incorporated, Albin Michel
Charles Dantzig, Dictionnaire égoïste de la littérature française, Grasset
Sylvie Germain, Magnus, Albin Michel
Régis Jauffret, Asiles de fous, Gallimard
Hçdi Kaddour, Waltenberg, Gallimard
Roger Puyravau, Morceaux, Maren Sell
Lydie Salvayre, Mçthode Mila, Seuil
Jean-Philippe Toussaint, Fuir, Minuit
François Weyergans, Salomé, Léo Scheer
Plus d’infos sur le prix du style : http://www.prixdustyle.com
Retrouvez Antoine Buéno dans son émission littéraire « Plume et Plomb » le lundi de 9h30 à 10 h sur Fréquence Paris Pluriel (106.3 FM)
La théorie des nuages de Stéphane Audeguy, Gallimard
A propos du livre : La théorie des nuages ou comment gagner sa part céleste ?
C’est une histoire en forme d’énigme : une femme fontaine rencontre des puits de science qui observent les nuages. Ou encore : quel est le lien entre l’explosion d’Hiroshima d’août 1945, celle du Krakatoa en août 1883 et la secte des quakers… ? Les nuages.
Des têtes en l’air
Et Stéphane Audeguy nous raconte la folle histoire de cette confrérie des têtes en l’air en mettant bout à bout les vies des météorologues fondus de nuages, depuis le début du XIX e siècle jusqu’à 1945, où ce sont d’innocents Japonais qui ont fondu sous un nuage de mort. Akira Kumo, grand couturier japonais installé en France (qui emprunte certains traits biographiques à Issey Miyaké d’ailleurs), engage Virginie Latour, jeune bibliothécaire discrète, pour l’aider à classer sa collection unique consacrée aux nuages et à ceux qui les ont étudiés. Depuis Luke Howard, le quaker, jusqu’à Abercrombie, le globe-trotter dément. Ca pèse très lourd, un nuage, on l’apprend en lisant le livre d’Audeguy. On apprend d’ailleurs des foules de choses dans son roman, légères et lourdes, utiles et futiles, romantiques et érotiques. C’est un livre nuage. Il flotte au-dessus des autres mais s’avère d’une densité remarquable.
La littérature c’est souvent cela : faire vivre de vieilles histoires par la magie du langage. Ici, la langue est d’apparence neutre mais l’on sent bien qu’elle est un moyen de partager. C’est généreux, gourmand… Quelques mots simples agencés de manière unique, qui se lisent sur plusieurs niveaux. Ce livre va vous envoyer en l’air avec les cendres du Krakatoa, vous faire lever le nez de votre écran, vous faire planer, vous exciter et vous faire enfin regarder par la fenêtre comme les cancres de Prévert. Sauf que là, l’auteur n’est pas un maître d’école. Il est assis à vos côtés et vous raconte des histoires à tiroirs, des histoires de savants, toute une généalogie, tout un panthéon aussi, dont le dieu suprême est un petit lutin taoïste.
La théorie des nuages a également reçu le prix de l’Académie française Maurice Genevoix
EXTRAIT :
« Vers les cinq heures du soir, tous les enfants sont tristes ils commencent à comprendre ce qu’est le temps. Le jour décline un peu. Il va falloir rentrer pourtant, être sage, et mentir. Un dimanche de juin 2005, vers les cinq heures du soir, un couturier japonais, nommé Akira Kumo, parle à la bibliothécaire qu’il vient d’engager. Il est assis au troisième étage de son hôtel particulier, rue Lamarck, dans sa bibliothèque personnelle qui fait face au ciel : trente mètres carrés de baie doublement vitrée filtrent tous les bruits de la ville. Au-dessus de la ligne grise des toits, les nuages s’étalent, les mêmes toujours et toujours changeants, oublieux des paysages qu’ils dominent.
La nouvelle bibliothécaire regarde les rayonnages. Elle s’appelle Virginie Latour. Akira Kumo lui parle de Londres au début du dix-neuvième siècle. D’abord Virginie Latour ne comprend pas grand-chose. Puis il est question de nuages. Il est question de nuages et Virginie Latour commence à comprendre. Elle comprend qu’au début du dix-neuvième siècle quelques hommes anonymes et muets, disséminés dans toute l’Europe, ont levé les yeux vers le ciel. Ils ont regardé les nuages avec attention, avec respect même; et, avec une sorte de piété tranquille, ils les ont aimés. L’Anglais Luke Howard était de ces hommes-là. »
En 2006, Stéphane Audeguy publie « Fils unique » toujours aux éditions Gallimard :
Présentation de l’éditeur :
« « On n’a plus eu de ses nouvelles depuis ce temps-là, et voilà comment je suis demeuré fils unique », écrit dans ses Confessions Jean-Jacques Rousseau en évoquant son frère aîné, ce François Rousseau contraint de quitter Genève où les choses pour lui avaient mal tourné.
Jean-Jacques tenait François pour un polisson et un libertin. Ce dernier apparemment ne l’a jamais démenti, qui n’a pas jugé nécessaire de nous laisser récit de sa vie. Il m’a semblé intéressant de remédier à cette négligence.» Stéphane Audeguy.
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