Melissa Bank était censée être la nouvelle Helen Fielding et son héroïne Jane, la cousine de Bridget Jones et de Woody Allen. Le titre « Manuel de chasse et de pêche à l’usage des filles » et le pitch en 4e de couv’ venaient confirmer cette promesse (alléchante il faut bien l’avouer !) : « Une jeune éditrice new-yorkaise parle de sa vie, de sa famille, de ses amis et ses amours ». Autant d’indices nous faisant miroiter un récit drôle, enlevé, et original sur les péripéties urbaines d’une jeune célibataire un brin névrosée. En fait c’est un peu moins simple et quelque peu inattendu…
Chaque chapitre est précédé ironiquement d’une citation extraite des manuels de savoir-vivre d’autrefois énonçant une régle de bienséance comme « La seule façon pour une femme, comme pour un homme de se connaître comme personne, est d’avoir une activité créatrice à soi » ou encore « Il est aisé d’être propre à l’extérieur. Il suffit d’avoir du savon, de l’eau, et une brosse en chiendent. Il est plus difficile d’être propre à l’intérieur. » Le chapitre qui suit n’a pas pour autant un rapport immédiat avec la sentence ou alors il faut savoir lire entre les lignes. C’est finalement cela le secret de ce manuel déroutant : lire entre les lignes et suivre les méandres de la narratrice, ses phrases à double sens où affleure toujours le second degré.
On suit Jane, gentille fille américaine à Papa, de Philadelphie, depuis son adolescence où elle se demande « si elle est jolie », échafaude des théories avec sa meilleure amie (comme les seins qui seraient, après tout, comme les oreillers, agréables mais pas indispensables), jalouse et admire les petites amies de son grand frère dans la maison de vacances familiale et puis grandit, vit ses premiers flirts et tombe amoureuse d’Archie, alcoolique et écrivain de trente ans son aîné qui l’entraîne dans une passion sans issue. C’est finalement le dernier chapitre qui porte le titre du livre qui s’avère le plus savoureux. Jane, un peu désepérée, tente d’enrayer la malédiction de ses échecs amoureux en se plongeant dans le manuel «Comment rencontrer l’homme idéal et l’épouser». Elle se conforme alors aux préceptes de deux coachs américaines typiques aux looks de pom-pom girls. Parmi leurs recommandations : « Ne pas être drôle avec un homme ! ».
Mélissa Bank nous ouvre ici son carnet de souvenirs et conte d’une écriture simple et fine, voilée de douce nostalgie, le parcours initiatique d’une jeune femme, ses émotions et son époque où filtre frustrations et fragilité. En parvenant à s’affranchir des codes convenus du genre pour atteindre une profondeur et une authenticité qui font tout son charme.
Un livre, au succès international, qui aura même séduit Francis Ford Coppola qui a acheté les droits d’adaptation au cinéma (le film devrait sortir au printemps prochain).
MAJ du 17/08/2006 : Le film sera finalement réalisé par le scénariste Marc Klein qui fera ainsi ses débuts de réalisateur. Au casting : Sarah Michelle Gellar dans le rôle titre accompagnée de Maggie Grace (de la série Lost) et Alec Baldwin. Le tournage a lieu cet été.
Dans son dernier roman Prochain arrêt : le paradis, elle reprend le même type de trame, une héroïne Sophie que l’on suit de l’adolescence à l’âge adulte au fil de sa construction et de son épanouissement amoureux, social et professionnel. Amitiés sur les campus, premiers flirts, rapports familiaux parfois houleux… Honnêtement on s’ennuie un peu par les similtudes avec le précédent (mieux vaut lire le premier) mais si vous êtses accro au genre alors foncez pour 374 pages de tribulations cocasses et attendrissantes. Côté style (très figuratif), très bien pour se détendre moins bien si on attend une vraie émotion littéraire. Mais au détour des paragraphes on trouve tout de même quelques perles telles que lorsque la narratrice décrit son travail d’éditrice « J’utilisais les formules qu’elle même employait : « Cette histoire n’est pas suffisamment forte », « les personnages ne sont pas assez vivants » ou encore la fameuse « Cela n’entre pas tout à fait dans le cadre de notre ligne éditoriale », toujours commode quelque soit le sens.
Sa grand-mère qui lui répète « qu’elle est une fille moderne dans tous les sens du terme » ou en se couchant à côté de son amant un dialogue savoureux :
– « Tu pues le bar » a t’il marmonné
– Et toi tu pues la bibliothèque, ai je pensé aussiôt. Mais comme j’avais envie de faire des folies avec nos corps, j’ai murmuré : « Tu fleures bon la poésie. »
Les afficionados apprécieront, les autres pourront se contenter du premier…
Deux ou trois choses que l’on sait de Melissa Bank :
Mélissa Bank ressemble un peu à ses héroïnes qui cherchent leur place dans la société… Sa vocation d’écrivain est venue très tôt mais elle a d’abord travailler dans la publicité. Le soir, elle akllait se chercher 2 goblets de café et elle écrivait. « je me suis beaucoup inspirée de ma vie, de mes proches, et surtout de mes émotions. » explique t’elle. Il lui faudra patienter 12 ans pour que l’une de ses nouvelles soit publiée dans la revue Francis Ford Coppola, « Zoetrope ». Aussitôt des agents prennent contact avec elle et l’on se bat pour l’éditer :
Retour au dossier « Les nouvelles amazones littéraires… Place aux filles«
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