Il aura été la bible de toute une génération d’adolescentes juste à côté de « L’Herbe bleue* » et d’E = MC2, mon amour : « Des cornichons au chocolat« , le journal « autobiographique, frais et sincère » (du moins présenté comme tel) de Stéphanie, adolescente écorchée et révoltée, de son chat Garfunkel, de sa crainte « des ragnagnas », des premiers flirts et de sa fugue finale, aura accompagné et rassuré bien des écolières et collégiennes dans leurs doutes et leur crise d’ado… Mais la mystérieuse Stéphanie faisait figure d’Arlésienne… Partie subitement en Australie quand ses lectrices la réclamaient à corps et à cris…
A l’occasion de la sortie de son nouveau roman « Franz et Clara » (où il se glisse une nouvelle fois dans la peau d’une jeune femme de 20 ans Clara, après son roman « Manuella » où il incarnait là, une lycéenne de 16 ans), Philippe Labro qui était jusqu’alors présenté comme le simple correcteur de la jeune Stéphanie, révèle qu’il est en fait l’auteur, insoupçonné, de ce livre « culte » des 80’s. L’auteur présumée n’est que pure fiction et n’a donc jamais existé…
Un choc pour des milliers d’adulescentes sans aucun doute ! 😉
Mais un beau pied de nez à ceux qui estiment qu’il existe « une littérature féminine » et que certains thèmes ne peuvent être abordés et écrits que par des femmes (voir article : la littérature a t’elle un sexe ?)…
Avec pourtant une question en filigrane : faut-il se faire passer pour quelqu’un d’autre et incarner son héros ou son héroïne, pour rencontrer l’intérêt des lecteurs ? La caution « histoire vraie » est-elle un gage de succès ?
A noter que l’Herbe bleue serait lui-aussi un « fake » dans le sens où ce journal d’adolescente, paru en 1971 sous le titre original de « Go Ask Alice », et racontant la dérive d’une jeune-fille ayant connu tous les outrages: drogue, inceste, viol, etc, serait en réalité un travail collectif supervisé par Beatrice Sparks, psychologue mormone alors âgée de 53 ans, et écrivain plus ou moins spécialisée dans les faux journaux intimes visant à « ramener les jeunes dans le droit chemin » selon les valeurs chrétiennes de l’Amérique de Reagan. Il serait néanmoins inspiré de l’expérience de l’une de ses patientes.
A l’époque le livre est présenté dans sa préface comme un journal découvert par des parents à la mort de leur fille de 17 ans. Alice est le prénom de la jeune copine. Restée clean, elle aurait tout tenté pour remettre sa copine sur les rails. Assez vite, un doute plane sur l’authenticité de la confession. C’est en 1998 que la presse révèle la véritable genèse de ce livre devenu culte entre temps.
12 Commentaires
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Et faut-il choisir entre Romain et Emile ?
Je ne sais pas pourquoi mais ce genre de nouvelle me réjouis. J’aime bien cette idée qu’un écrivain puisse se travestir au point d’abuser des centaines de milliers de gens.
Et puis, j’ai un contentieux avec Labro, c’est un écrivain dont j’ai acheté trois fois le même livre en poche "L’étudiant étranger". La deuxième fois j’ai relu quinze pages avant de m’en rendre compte, puis deux pages et maintenant je le reconnais au début du 4ième de couverture "Invité par une prestigieuse université de Virginie…" ce qui devrait m’éviter un autre achat 🙂
oui mais contrairement à JT Leroy, il aurait eu du mal à se travestir en ado de 13 ans :-))
meeeerde !!!! lol !!!!! javais lu MAnuella et je l avais pas du tt trouvé credible.. alors que j avais adoré les cornichons mais j’avais 9-10 ans faut dire… je sais pas si c est une question d age ou d influence par l auteur ???
pourquoi l’avouer maintenant ? J’en vois pas l’intérêt ou alors pour le coup de pub qui va relancer les ventes. Le pire c’est que ça pourrait marcher!
C’est une rumeur ou confirmé ?
ben en tout cas ça me donne envie de l’exhumer de mon grenier pour voir si l’âge aidant je suis moins dupe ! quel filou ce philou 😉
et ma question ? rumeur ou non ?
merci
Pas rumeur. Confirmé de la bouche de M’sieur Labro lui même, un peu plus de 20 ans plus tard donc… Envie de soulager sa conscience ? Ou coup de pub peut-être comme le suggère Millie ? Qui sait…
et bien moi je suis choquée parce que j’ai lu ce livre au moins cinq fois quand j’étais ado et j’ai toujours cru que c’était une gamine de 13 ans qui avait écrit ce livre! Je me sens trahie et je pèse mes mots! J’aurais préféré ne rien savoir. Je ne renie pas le talent de Labro mais c’est pire que quand on m’a annoncé que le père Noël n’existait pas!
Et le journal d’Anne Franck? On va bientôt apprendre que c’est Boris Vian ou Barjavel qui l’ont écrit?
Cela pose la question de l’importance de l’auteur.
Qu’est ce qui compte : l’auteur ou le livre ?
Ce livre aurait-il été lu différemment (et aurait-il eu le même succès) si l’on avait su qu’il s’agissait d’une fiction et non d’un témoignage autobiographique ?….
Moi ça me rassure plutôt, parce qu’il me restait un soupçon de complexe par rapport à cette Stéphanie, alors que je tentais d’écrire un peu… Ca fait pas mal d’années que je me dis que ce livre est beaucoup trop construit, point de vue de l’histoire et point de vue du style pour que ça puisse être le récit spontané d’une adolescente.
Et à choisir je préfère connaître la réalité.
Ca ne me gène pas qu’un auteur ait été capable de mettre des mots sur les angoisses adolescentes. C’est ça la littérature, les autobiographies ne sont pas nécessairement plus parlantes.