Les jeux sont faits !, nous annonce le dernier numéro de Technikart (daté juillet/août 2006) dans son enquête intitulée « La rentrée littéraire a déjà eu lieu ». Le magazine dévoile ses pronostics : « les gagnants et les perdants de l’évènement » à coup de stratégies d’éditeurs, de copinages médiatiques, de prix littéraires calculés, de drague des libraires dont le rôle de prescripteur va croissant et de statistiques sur les publications… De quoi encore alimenter le feu de certains ! Baptiste Liger et Jean Perrier décryptent dans cette enquête les rouages de la rentrée littéraire, qui n’est selon eux, qu’un vaste coup monté où tout est joué d’avance. Et de relater le plan comm’ lancé début mai auprès des journaux, les dédicaces besogneuses des auteurs aux journalistes (« Hommages de l’auteur », « Bien cordialement » ou « Amitiés »…), avec à la clé la formule type de l’attaché de presse anxieux « Qu’as tu pensé du livre de… ? » qui spamment messageries électroniques et vocales des journalistes en vacances.
Les alliances se nouent assez vite et l’on sait sur qui il faudra miser et qui sera laissé en rade. Par exemple pour 2006, le champion devrait être « Fraternité » de Marc Weitzmann , estiment-ils.
Et l’épineux problème des 500 romans qui passent à l’as sur les 600 publiés… L’influence des libraires peut peut-être nuancer la donne et réserver quelques surprises comme le succès de « La suite française » d’Irène Nemirovsky, en 2003 ou du bide relatif de « La possibilité d’une île » de Houellebecq.
Ils tendent à devenir les nouveaux prescripteurs (avec quelques figures stars comme Colette Kerber ou Laurent Bonelli) auprès des lecteurs qui leur font davantage confiance. Qu’à cela ne tienne, les éditeurs leur servent aussi la soupe lors de « soirées rencontres ». Problème : la surcharge de livres (« à peine le temps de déballer les cartons, que de nouveaux colis arrivent »). Conséquence : les ouvrages les plus fragiles prennent le pilon avant même d’avoir eu un seul papier.
Des confirmations donc plus que des révélations dans ce papier.
Plus intéressant et rigolo la typologie des « huit familles du French roman » parmi lesquelles on trouve par exemple la famille « Ségolène », la famille « César d’honneur », la famille « Retour d’ascenseur », la famille « Dossier de l’écran »… ou encore la famille « Contrat première embauche ». Cette dernière retient plus particulièrement notre attention, elle regroupe les romans « sur la jeunesse désoeuvrée des villes et la branchitude, écrit par un jeune auteur désoeuvré, urbain et branché (rarement précaire mais souvent jetable). En version fille c’est une bombe (dont on enverra au préalable la photo aux journalistes) qui tape dans le roman érotique ». A titre d’exemple ? Jessica L.Nelson, propose t’il pour 2005.
Dans cette famille, ils élisent en « meilleur de la rentrée 2006 » : Anima Motrix d’Arno Bertina, « un fascinant road-trip métaphysique d’un personnage paumé au milieu de mondains et de réfugiés » ou encore le premier roman de Jonathan Littell « Les bienveillantes » et le deuxième de Stéphane Audeguy (prix du style et prix de l’Académie française Maurice Genevoixen 2005) « Fils unique ». Et dans le pire… Julien Parme de Florian Zeller bien sûr, le bouc-émissaire favori. « Très inspiré de L’Attrape-Coeurs de Salinger, le talent et la tendresse en moins », selon Technikart.
Un numéro frais et décalé comme Technikart en a le secret, à glisser dans sa serviette de plage (à lire aussi un chouette article sur le nouveau film de Charlotte Gainsbourg, « La science des rêves » réalisé par Michel Gondry ou encore une enquête de société intitulée « Jeunes parents : mais pourquoi sont-ils si chiants ? »…)
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