Le premier bilan américain des « blog books » (blogs adaptés en livres) s’avère décevant, nous apprend Livres Hebdo. Depuis deux ans, de nombreux romans sont issus de blogs anonymes (ou presque) dénichés par les éditeurs pour leur ton ou leur opinion. On les appelle communément les « Blooks ». Le premier bilan qui en est tiré n’affiche pas de très bons résultats, selon les experts. Le succès sur Internet ne se transforme pas en best-sellers une fois ces blogs imprimés et reliés. Un jugement un peu sèvère au vu des prévisions de vente irréalistes…
Ce semi-échec s’expliquerait par le fait que les fans avérés du blog ont déjà lu le contenu et donc ne voient pas l’intérêt de l’acheter en livre. Un raisonnement qu’avait tenu Robert Laffont au sujet du blog de Max en l’obligeant à fermer son blog à la parution du livre. Livre dont les ventes n’auraient pas non plus tenu les promesses (objectif de 100 000 exemplaires) même si elles sont tout de même restées très honorables pour un premier roman (près de 10 000 exemplaires vendus) ! Et encourageante puisque l’auteur écrit actuellement un second livre « plus personnel » (ah non il ne l’était pas le premier ?). Les blogs de Frantico (Lewis Trondheim alors anonyme) et de Lovely Gorreta ont également débouché sur des albums-BD aux ventes très honorables.
Certains éditeurs ont payé de grosses sommes (500 000 $ pour celui de Stephanie Klein) pour acquérir les droits. Une bulle «internet» de l’édition en quelque sorte. Ce qui marche en blog (Gay Vinci Code, Baghdad Burning, Anonymous Lawyer) n’est pas synonyme de triomphe en librairie.
Le magazine note toutefois une rare exception : Tucker Max devenu auteur à part entière (I Hope They Serve Beer in Hell est dans les 200 meilleures ventes d’Amazon).
Les Blooks ont quand même leur «Goncourt», le Blooker Prize , sponsorisé par Lulu. A en juger leurs ventes sur Amazon, les gagnants de l’an dernier n’intéresseraient personne…
Il est étrange de noter cette distinction entre livres « issus de blogs » et livres « traditionnels », le résultat n’est-il pas le même au final : un auteur, une histoire, un roman, une voix, un univers, un talent ? Comme s’il s’agissait d’un réseau parallèle littéraire miraculeux…
Le constat déceptif est donc à relativiser. Les espoirs de vente étant totalement démesurés au départ, les résultats ont peu de chance d’être à la hauteur. Les « blogs-books » ont certainement de l’avenir mais comme pour les autres il n’existe pas de science exacte pour prédire leur succès littéraire… L’adaptation d’un blog en livre est également délicate puisqu’il ne s’agit pas du même mode de narration. Ce qui fonctionne très bien en ligne, dans le feu de la spontanéité, peut tomber à plat une fois figé sur papier et relié…
Une plus grande rationalisation et prudence dans les chiffres guideront sans doute les futurs éditeurs qui se lanceront dans l’aventure.
8 Commentaires
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Ca ne m’étonne pas vraiment… Ceci étant, le contraire est aussi vrai : de ma propre expérience sur des livres de cinéma type "chronique", certains éditeurs m’ont proposé d’"en faire un site Internet". Comme quoi les mystères de l’édition sont impénétrables…
Et c’est ce qui a donné naissance à Culture café si je comprends bien ? Mais quel était l’intérêt pour l’éditeur…
Pour en revenir à ces "blooks" (terme bien hideux), il y a sans doute eu un effet de mode avec un emballement disproportionné lié à la nouveauté.
Je pense que celui-ci va se rationaliser désormais mais de là à conclure que le blog est une "source" littéraire décevante semble un peu hâtif…
Je suis aussi en train de me demander si en France le seul exemple de blog adapté en roman est Max ou s’il y en a eu d’autres… ?
J’ai tendance à me mélanger avec les anglo-saxons…
Télérama proposait le terme "blivre", c’est mieux que "blook", non?
Pour le reste, moi qui tient des blogs et écris des livres, je ne vois pas comment je pourrais faire un livre en compilant mes posts.
Télérama a fait un papier sur les "blivres" (terme tout aussi hideux, sorry !) ?
Pour moi, ils ne devraient pas porter de nom spécifique, ce sont des livres comme les autres, après que l’on mentionne en 4e de couv’ qu’ils émanent d’un blog pourquoi pas mais cela n’en fait pas un genre à part enfin je ne pense pas…
Ce n’est pas vraiment ça qui a donné naissance à Culture Café, mais plutot l’envie de chroniquer la culture au quotidien plutot que dans un livre.
A propos des "blivres", Reuters a sorti aujourd’hui une dépèche à l’occasion de la foire de Francfort. Il y est notamment dit que c’est l’affluence de livres tirés de blogs, censée compensée les déceptions des ventes de ces derniers, qui va tuer le phénomène.
Intéressant,merci,… J’ai vu la depeche sur yahoo http://fr.news.yahoo.com/06102006/290/les-livres-tires-de-blogs-victimes-de-leur-succes.html. Il parle de la situation anglo-saxonne essentiellement. A priori beaucoup d’ouvrages tirés des blogs ont été des succès d’édition au sens classique du terme sans pour autant être à la hauteur des espérances (1 million d’exemplaires vendus attendus c’est qd même un brin exagéré !)
J’espère que les excès liés à « l’effet de mode » ne vont pas tarir le blog comme source potentielle de livre.
Et quand on fait un blog à partir d’un livre, on fait quoi? un blolivre?
J’M.
Sur le sujet, voir aussi un billet de Pierre Assouline.
passouline.blog.lemonde.f…
Sinon, oui, le mode de narration est différent: c’est ce qui fait à la fois l’avantage (nouvelles formes d’écriture) et l’inconvénient de la chose (comment en rendre compte sur le papier), non ?