Anne-Laure Bovéron, critique littéraire pour le magazine Muze, a choisi de partager son coup de coeur pour ce premier roman écrit à l’âge de 17 ans, un hymne à la vie tumultueux, d’une grande humanité, d’une profondeur et d’une sensibilité sincère. Dix ans plus tard, elle le publie enfin, poussée par ses amis. Dix ans, et pas une ride ! La qualité du texte et la justesse des sentiments nont pas vieilli, ni perdu de leurs superbes et de leurs vérités. Un livre intimiste, pudique, contemporain, pur et violent. Tant au point de vue des expériences, des rencontres, des obstacles que de la réalité de la vie quil dépeint. Des émotions vraies, cruellement palpable, vécues que connaissent ceux qui franchissent avec fracas la frontière invisible entre l’adolescence et l’âge adulte. La finesse des caractères des protagonistes, la splendeur simple des paysages marins, des scènes urbaines et du quotidien embellissent ce récit envoûtant. L’écrivain, lectrice insatiable, a su nourrir son roman de la beauté indicible des sentiments. Les romans sur le passage des âges, de l’enfance à l’adolescence, de l’adolescence à l’âge adulte, ne manquent pas. Mais celui-ci se démarque. Singularité et puissance des mots. Un auteur à suivre donc. En attendant, vive nos nuits trop claires pour ne plus lâcher ces lignes !
Quelques mots, quelques sentiments, jetés à la volée ou en pâture. Alexis se tait. Retenir les aveux et les peurs pour les contenir, ne pas se laisser submerger et tenir le cap, quelques soient les horizons. Puis noyer les craintes et les doutes sur le pavé humide de la ville.
Sorties nocturnes, en solitaire. Il arpente des heures durant les rues, sans but ultime ni quête. Il se pense transparent, mais Pierre, un jeune homme qui aurait pu être son grand frère l’a remarqué, lui et son étui à guitare. Dès lors, Pierre n’aura de cesse de bousculer Alexis, pour fendre sa carapace, et lui apprendre, sans discours moralisateur, à vivre.
Alexis est à l’aube de sa destinée, il fait ses premiers pas dans sa vie d’homme, de musicien aux côtés de Pierre, damoureux avec Constance, aussi fragile quenvoûtante. Cette demoiselle, qui renferme le souvenir d’une autre femme énigmatique et inssaisissable, est journalsite. Mais bien plus encore.
Elle se consacre à l’écriture, passionnèment. La nuit surtout. Leur union est celle de deux solitudes. Deux personnalités qui s’épaulent autant qu’elles se déchirent, sous la protection d’Arthur, un ami de Constance qui sera aussi leur pillier. Les obstacles et les désillusions s’enchaîent pour Alexis qui doit faire face aux imprévus, aux absences douleureuses et injustes. A la vie, en somme. Les rencontres sont le sel de la vie, ce qui la fait vibrer.
Le parcours dAlexis en est constellé. Etoiles filantes ou étoile du Berger, elles le guident, contre vents et marées. Derrière une écriture brillante, acérée et juste, souriante et acide, se cache une grande humanité et l’âme d’un écrivain. Un regard profond sur l’existence, sur ses douleurs et ses lumières. La beauté que la vie dissimule parfois trop savamment mais que l’auteur révèle vec brio. Un goût d’encore, d’envie de vivre malgré tout, qu’elle dépose, lignes après lignes, dans le sérail de nos certitudes. L’essence même de l’écriture est ici frôler, la mise en mots des émotions indicibles.
Extrait choisi :
Une fois seuls, elle le déshabille et le met sous la douche brûlante, longtemps. Elle l’aide à se sécher, lui envoie à travers la pièce le caleçon et le tee-shirt qui lui servent de pyjama. Poupée creuse, il les enfile pendant quelle le regarde, avec au fond des yeux une lueur indéfinissable, une brume. Elle pense aux canards dont on dit qu’ils font quelques pas encore, la tête tranchée, comme si de rien n’était. La lumière noircit ses cernes. Il est pâle. Il vient se coucher près d’elle. Elle caresse ses cheveux. Alors, il lève ses yeux vers elle, cherchant quelque chose dans les siens. Et elle, elle se laisse mettre à nu, sachant quil ne trouvera pas, poignardée par la détresse qui déforme peu à peu ses traits, ravagée par son impuissance. Elle ne peut qu’abaisser ses paupières sur ce désastre, priant qu’il lui pardonne. Elle sent alors ses bras qui la serrent très fort. En lui quelque chose se rompt. Il pleure un long moment agrippé à son corps. Il finit par se détacher d’elle et se tourne contre le mur. Elle éteint et fait semblant de dormir, guettant dans le noir muet. A un moment, elle entend encore un sanglot rauque déchirer l’ombre, puis plus rien. Il y a plus tard encore un silence convulsif où elle devine qu’il pleure toujours. Vers cinq heures du matin, il s’endort. Doucement, elle se lève, s’habille et se dissout dans le couloir. Il ne s’est pas réveillé. Il s’est remis à pleuvoir. Elle rentre trois heures plus tard… Même après ça, il y eut encore un matin. Quand il a ouvert les yeux, elle lui souriait. Il a trouvé beau ce sourire. Elle lui rappelait Morgane. À ses oreilles, il y avait la mer qui le berçait, plainte intime. Au fond de son ventre, il n’y avait plus rien. La souffrance était rentrée, profonde, gazant tout sur son passage. L’armure était solide. Elle avait résisté. Lêtre à lintérieur avait péri. Cela, il le savait. Il aurait aimé en rire, par désespoir. Il n’y avait rien quun trou noir et cette fausse conscience construite à force d’habitudes accumulées. Il aurait préféré être tout à fait mort, juste une route lumineuse sur une machine. Parce que dans ce désastre, il y avait encore des saccades, et que chacune d’elles augmentait un peu plus le supplice du manque. Et cette douleur venait, comme la vague, se rajouter à la précédente, preuve écarlate quil vivait tellement plus qu’il ne le pensait. Elle lui souriait et lui la regardait, sachant quil y aurait d’autres matins.
Informations de l’éditeur sur le livre
Informations de l’éditeur sur l’auteur.
L’auteur tient également un blog de critiques littéraires.
2 Commentaires
Je suis sous le charme de l’extrait proposé. L’ambiance est vraiment palpable. Je crois que je vais me le procurer très vite. Ce roman me semble très prometteur.
Ce que j’aime avec ce livre, c’est le reprendre de temps à autre. En lire des passages, ou son entier. J’ai toujours l’impression de ressentir de nouvelles émotions, de voir de nouveaux détails… A mes yeux, ce livre fait partie d’un de mes classiques. Il m’accompagne.
A savoir, Véronique Béraud de Calignon devrait dédicacer, sous réserve, son livre au salon du livre. Mardi 27 mars, de 10h à 12h, sur le stand de sa maison d’édition, In Octavo (stand N64)
Bonne lecture…