Suite à l’article paru récemment sur la collaboration de la romancière Max Monnehay au magazine Playboy, Yan Ceh, son rédacteur en chef nous informe par e-mail d’un nouveau numéro (déc.07) qu’il qualifie de « très littéraire », avec cette fois, « un texte inédit de Boris Bergmann sur Julie Ordon, en couverture de ce numéro, ainsi qu’un texte inédit de Jonathan Safran Foer, « L’Extrême Nudité de la Page Blanche », une playlist 2007 détaillée en 5 albums par Yannick Haenel, Prix Décembre pour « Cercle » (Gallimard) et également une interview de 8 pages de Philippe Sollers (« L’Interview PLAYBOY » du mois) », nous détaille-t-il.
Yan Ceh est notamment l’acolyte de Frédéric Beigbeder dans le duo de DJs « Dumb & Dumber« . L’écrivain est d’ailleurs une des nouvelles signatures du magazine aux côtés de François Bégaudeau.
Arrivé récemment à la tête du sulfureux magazine, Yan Ceh a décidé de renouer avec la fiction littéraire : « C’était super important en contrepoids des playmates à poil sur 10 pages… Il y a un moment où tu as aussi envie d’avoir un peu de texte. Dans le numéro de novembre, Max Monnehay a écrit une fiction sur la masturbation féminine. Quand tu lis la nouvelle écrite par une fille de 25 ans super mignonne, je peux te dire que ça fait de l’effet !« , a-t-il déclaré au site isubway
Et d’ajouter : « J’aime bien prendre les gens à contre-courant de ce qu’ils font d’habitude. J’aimerais bien des personnes comme Régis Jauffret ou Philippe Sollers. Jean-Jacques Schull, prix Goncourt, a d’ailleurs envie d’écrire une fiction. On est aussi en discussion avec Michel Houellebecq… Des chanteurs comme Julien Doré ou Raphaël nous ont également proposé d’écrire dans Playboy et d’interviewer d’autres personnalités, comme des écrivains par exemple… Ce qui permettra à plein de jeunes de s’intéresser à ces personnes-là, pas forcément connues des 15-25 ans… C’est quelque chose où on est en contradiction avec les magazines trash et people. On sort de ce cercle là et on l’on va vers une publication où les gens apprennent des choses et découvrent des trucs intelligents. »
Un pari audacieux, rappelant le parti-pris du célèbre New-Yorker qui fait la part belle à la fiction, qui risque de surprendre les lecteurs habituels mais qui pourront désormais le laisser désormais bien en évidence sur leur table de nuit (non Chérie, je me cultive !) et non plus dissimulé sous leur matelas…
Trois questions à Yan Ceh, rédacteur en chef de Playboy :
Dans une interview vous dites que Playboy essaie de renouer avec la « fiction littéraire ». Est-ce à dire que vous seriez ouvert à recevoir et publier quelques textes de jeunes auteurs, révéler de nouveaux talents, un peu dans l’esprit du New-Yorker ?
« Oui. Révéler est un grand mot, mais nous essayons déjà de mettre en avant de jeunes auteurs – comme ce fut le cas avec la nouvelle inédite de Max Monnehay prenant la thématique de la masturbation féminine, ou le texte de Boris Bergmann, révélation teenager de la rentrée littéraire. Et nous les faisons paraître en parallèle à des auteurs confirmés, comme T.C Boyle ou pour ce numéro en cours Jonathan Safran Foer. Avec, en fond, les participations mensuelles de François Bégaudeau (sur le cinéma) ou de Frédéric Beigbeder (à la critique littéraire et portraits). Sans oublier aussi des interviews comme celle de Philippe Sollers, et la playlist 2007 de Yannick Haenel, Prix Décembre cette année avec l’excellent « Cercle ». Donc, sans avoir la prétention du New Yorker, j’aime l’idée de faire de Playboy un magazine de style – des filles à la mode en passant par la littérature. »
Les collaborations de Julien Doré ou Raphaël sont elles confirmées ?
« Julien Doré prépare une intervention dés le prochain numéro. Raphaël a évoqué l’envie de réaliser une interview, d’un grand écrivain, sans que pour le moment cette idée soit planifiée. »
Quels sont vos goûts/références littéraires personnels ?
« Parmi les écrivains vivants : Douglas Coupland (des débuts), Régis Jauffret (surtout ses « Microfictions » que j’ai énormément aimé), Jonathan Safran Foer, Michel Houellebecq, Thomas Clerc, François Bégaudeau, Yannick Haenel (« Cercle », une révélation), Dennis Cooper, Philip Roth, Miranda July, Philippe Sollers, Yves Adrien. Et bien sûr Jean-Jacques Schuhl et Frédéric Beigbeder, qui sont aussi des amis, de vraies grandes rencontres pour moi. Nous parlons souvent et beaucoup de littérature. J’allais oublié un écrivain que j’ai interviewé récemment pour Blast et dont j’apprécie beaucoup la posture: Gabriel Matzneff. Et J.D. Salinger aussi. Et j’en oublie sûrement beaucoup d’autres. Dans les morts, pas très original – Baudelaire, Rimbaud, Montaigne, Proust, Baudrillard (que je considère plus comme un écrivain qu’autre chose), Rilke… Je dois préciser que j’ai beaucoup lu de livres écrits par des artistes, Donald Judd, Marcel Duchamp, Peter Halley, Joseph Kosuth, Agnès Martin. »
Extraits des textes de Boris Bergmann et Jonathan Safran Foer :
« Nous dansons au dessus d’une immense forêt. Elle s’est levée, m’a pris la main et m’a emmené là. Sur cette immense plaque de verre, ce miroir de Risée qui vous montre votre plus grand désir, sur cette lande de feu, de sang, d’amour : nous valsons ! Les violons hurlent dans le ciel du petit matin. Les anges noirs soufflent dans ses cheveux. Mon smoking blanc frotte contre sa robe rouge. Mes lèvres sont tellement proches… Cine Qua Pop. C’est la messe de l’Amour ! Les mains croisées, sous les lumières des vitraux : je prie pour qu’elle ne s’arrête jamais. Jamais. J’entends ses bottes claquer contre le rebord du miroir, je baisse la tête. Trop tard, la vitre se fissure, nos pieds touchent le vide. Libre équilibre. Nous tombons dans le ciel, déchirant les nuages et leurs pitoyables éclairs de pacotille. » – Extrait de « Julie Ordon : Libre Équilibre » de Boris Bergmann. (c) Playboy Inc. & B. Bergmann 2007.
« J’ai commencé à collectionner des feuilles blanches juste après avoir terminé mon premier roman, il y a environ cinq ans. Un ami de la famille s’occuper de réunir les archives du grand romancier décédé, Isaac Bashevis Singer, pour conserver ses écrits et dossiers dans à l’Université. Parmi les nombreuses choses à disposition, une pile de feuilles inutilisées appartenant à l’auteur. ( Logiquement il avait été conclu que ces pages vides n’avaient pas valeur d’archive). Mon ami m’envoya la première page de la dites pile – la feuille qu’aurait utilisé Singer pour écrire s’il n’était pas mort à ce moment-là – en suspectant que je prendrais sûrement quelque plaisir en me souvenant de la vie de cet immense auteur. » – Extrait de « Extrême Nudité de la Page Blanche » de Jonathan Safran Foer. (c) Playboy Inc. & J. Safran Foer 2007.
4 Commentaires
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Ca a l’air cool… 🙂
pour une fois un mix "branchitude"/"porno chic" & littérature (avec une large palette d’auteurs), ça donne envie!
De toutes façons quand on voit les pubs dans les magazines "tout public" (prime a dolce et gabbana, a part un mec en erection en gros plan ils ont tout fait) on se dit que des photos porno chic ça ne peut être que.. mieux!
;)))
sinon j’adorerais bosser dans un magazine comme ça…Mais au fait il te faut peut être un critique pour ce numéro? Tu as toujours mon adresse?
;)))
yann
Si on bosse pour Playboy, on a le droit de visiteur la demeure de Heff’? Et on peut aller aux séances photos pour s’inspirer?
ah mais non Joest, c’est fini le bon vieux temps, les blondes plantureuses se retrouvent désormais dans la bibliothèque du manoir avec leurs petites lunettes ! 😉
Sinon je trouve que cette nouvelle orientation est courageuse de la part de Yan Ceh mais honnêtement, je n’y crois pas trop… Les lecteurs s’intéressent plus aux petites culottes qu’à la littérature à mon avis. Je souhaite bien sûr me tromper !
Pour contacter le magazine, vous pouvez passer par sa page myspace que Yan Ceh vient de me transmettre et qui remplace le lien vers le blog Playboy qui n’est pas géré par le magazine apparemment.
Bonne chance !