A l’occasion d’une tribune pour le journal le Monde en 2009, l’auteur de « Lignes de faille », Nancy Huston déclinait au masculin le célèbre adage de Simone de Beauvoir, « On ne naît pas femme, on le devient. » Après son essai « Professeurs de désespoir » où elle s’attaquait à la littérature « nihiliste », elle analysait ici les ressorts de la violence et de la criminalité, avec virulence… et sans doute un brin de manichéisme. « Oui, il faut avoir un pénis et des testicules pour ainsi charcuter, violer, ouvrir le corps des autres à la machette, au poignard ou à l’épée, les déchiqueter à la mitraillette, les décapiter et jouer aux boules avec les têtes… » écrit-elle, ne manquant pas de déclencher au passage la polémique sur le site du journal…
Nancy Huston compare notamment l’instinct de maternité à celui de la violence avant de conclure que l’un et l’autre sont des constructions sociales et tente d’appeler, un peu maladroitement, à un plus grand échange et écoute entre les sexes… On se souvient également de la réflexion de Michel Houellebecq dans Les particules élémentaires : « Au fond, se demandait Michel en observant les mouvements du soleil sur les rideaux, à quoi servaient les hommes ? Il est possible qu’à des époques antérieures, où les ours étaient nombreux, la virilité ait pu jouer un rôle spécifique et irremplaçable ; mais depuis quelques siècles, les hommes ne servaient visiblement à peu près plus à rien. Ils trompaient parfois leur ennui en faisant des parties de tennis, ce qui était un moindre mal ; mais parfois aussi ils estimaient utile de faire avancer l’histoire, c’est à dire essentiellement de provoquer des révolutions et des guerres. »
Extraits de la tribune de Nancy Huston :
« (…) les sociétés de tout temps s’acharnent à fabriquer justement des hommes – en contraignant les garçons, par la violence, les menaces et l’humiliation, à se différencier des filles. (…) les hommes constituent, de par le monde, entre 90 % et 100 % des criminels, des pédophiles, des violeurs, des généraux, des chefs d’Etat et des grands leaders religieux.
(…) pourquoi n’interroge-t-on jamais « l’instinct » qui pousse les hommes à faire la guerre ? Car si, dans toutes les espèces proches de l’humaine, l’on observe que les mères s’occupent de leur progéniture, dans aucune espèce animale autre que l’humaine on ne voit les mâles s’entre-tuer de façon organisée et préméditée.
(…) j’aimerais bien savoir pourquoi la spécificité des hommes (c’est-à-dire des mâles de l’espèce humaine) semble être le massacre des innocents. Ce n’est pas l’espèce humaine qui fait ça, ce sont les phallophores, jeunes le plus souvent mais encouragés, excités, éperonnés par des vieux.
(…) Hypothèse en pointillé : dès qu’un petit garçon comprend qu’il vient (que tout le monde vient) de l’intérieur d’un corps de femme, un corps donc différent du sien, il se met à construire et à détruire, à bricoler, à manier, à remanier et à tripatouiller, la petite fille ne fait pas cela. (…) Après le dépeçage du nounours, après le carnage, ils laissent derrière eux : non-sens, monceaux de chairs mortes qui ne veulent plus rien dire. Ils ont réussi à transformer le vivant en mort, en objet, en chose, en rien : puissance sidérante qui ne peut se comparer qu’à celle de mettre un enfant au monde.
(…) Tout dans l’espèce humaine est construit, y compris ce qui nous vient des instincts. Tout est susceptible de devenir objet d’apprentissage, de commentaire, d’interprétation. (…) »
1 Commentaire
bonjour,
mon avis est que Nancy Houston réfléchit comme un tambour et que des livres comme "professeurs de desespoir" sont des requisitoires pleins d’injustes parti-pris.