L’écrivain et scénariste Amanda Sthers inaugure chez Plon une nouvelle collection consistant à se glisser dans la peau d’un personnage célèbre :
L’auteur qui aime jouer avec les travestissements d’identité (comme dans sa pièce « Le juif blonde » où un vieux juif parlait à travers le corps d’une jeune fille ou encore dans son roman « Keith me » où elle jouait avec le légendaire Keith Richards des Rolling Stones) signe le premier ouvrage en s’imaginant dans la tête de l’étonnant Liberace (1919-1987), pianiste et showman de renom à Las Vegas. Dans un mois, fin octobre, David Foenkinos lui succèdera en se réincarnant dans la peau de John Lennon. Pour les titres suivants, Amanda Sthers envisage de demander à quelques auteurs qu’elle affectionne, comme Philippe Grimbert, Philippe Besson ou encore Tatiana de Rosnay, de se glisser eux aussi dans la peau de leur personnage fétiche. (source : L’Express)
Présentation de l’éditeur :
Son nom est très peu connu en France, et pourtant Liberace est une star en Amérique. Amanda Sthers s’est emparée de cette figure à part et de ce destin singulier. Elle y a trouvé le matériau exubérant, poignant et parfois douloureux d’une oeuvre littéraire qui dépasse, et de loin, la simple biographie. En sept séances de psychanalyse fantasmées, Liberace raconte sa vie sous la plume d’Amanda Sthers. Pianiste virtuose, il est l’un des premiers à avoir popularisé sa musique, donnant des spectacles à Vegas puis animant un show télévisuel aux audiences extraordinaires. Sous les yeux ébahis des vieilles filles du Milwaukee qui attendaient, tremblantes, un geste de lui, il sortait de sa limousine, revêtu de visons extravagants, pour jouer des boogie woogie endiablés. Comment ne se sont-elles pas rendu compte que ce grand garçon mou en short à paillettes était homosexuel ? Si elles avaient su qu’il avait fait refaire le visage de Scott Thornson, son concubin de trente ans son cadet, afin qu’il ait les mêmes traits que lui quand il était jeune ! Portrait de Dorian Gray en chair et en os ? Reflet à baiser ? Mythe de Narcisse ? Complexe d’Oedipe mal réglé ? Recherche de son jumeau mort-né ? Quoiqu’il en soit, Liberace finira par le mettre à la porte avec ses fringues dans des sacs poubelles, et Scott lui fera un procès retentissant ! Après une vie sous l’égide de sa mère castratrice et baignée par une lumière artificielle qui ne l’a jamais comblé, Liberace succombera, parmi les premiers, au sida.
2 Commentaires
Quel est le nom de la collection? Parce que le site de Plon n’en dit rien. Il aurait bien besoin d’un refonte totale au passage, la navigation est super pénible.
LES VIEILLES FILLES
J’aime les vieilles filles. Et lorsqu’elles sont laides, c’est encore mieux.
Les vieilles filles laides, acariâtre, bigotes ont les charmes baroques et amers des bières irlandaises. Ces amantes sauvages sont des crabes difficiles à consommer : il faut savoir se frayer un chemin âpre et divin entre leurs pinces osseuses. Quand les vieilles filles sourient, elles grimacent. Quand elles prient, elles blasphèment. Quand elles aiment, elles maudissent. Leurs plaisirs sont une soupe vengeresse qui les maintient en vie. Elles raffolent de leur potage de fiel et d’épines. Tantôt glacé, tantôt brûlant, elles avalent d’un trait leur bol de passions fermentées. Les vieilles filles sont perverses. C’est leur jardin secret à elles, bien que nul n’ignore leurs vices.
Les vieilles filles sont des amantes recherchées : les esthètes savent apprécier ces sorcières d’alcôve. Comme des champignons vénéneux, elles anesthésient les coeurs, enchantent les pensées, remuent les âmes, troublent les sangs. Leur poison est un régal pour le sybarite.
L’hypocrisie, c’est leur vertu. La médisance leur tient lieu de bénédiction. La méchanceté est leur coquetterie. Le mensonge, c’est leur parole donnée. Elles ne rateraient pour rien au monde une messe, leur cher curé étant leur pire ennemi. Le Diable n’est jamais loin d’elles, qui prend les traits de leur jolie voisine de palier, du simple passant ou de l’authentique Vertu (celle qui les effraie tant). Elles épient le monde derrière leurs petits carreaux impeccablement lustrés. Elles adorent les enfants, se délectant à l’idée d’étouffer leurs rires. Mais surtout, elles ne résistent pas à leur péché mignon : faire la conversation avec les belles femmes. Vengeance subtile que de s’afficher en flatteuses compagnies tout en se sachant fielleuses, sèches, austères… C’est qu’elles portent le chignon comme une couronne : là éclate leur orgueil de frustrées.
Oui, j’aime les vieilles filles laides et méchantes. A l’opposé des belles femmes heureuses et épanouies, les vieilles filles laides et méchantes portent en elles des rêves désespérés, et leurs cauchemars ressemblent à des cris de chouette dans la nuit. Trésors dérisoires et magnifiques, à la mesure de leur infinie détresse. Contrairement aux femmes belles et heureuses, elles ont bien plus de raisons de m’aimer et de me haïr, de m’adorer et de me maudire, de lire et de relire ces mots en forme d’hommage, inlassablement, désespérément, infiniment.
Raphaël Zacharie de IZARRA