Pas une semaine ne passe, sans qu’un nouveau scandale de plagiat littéraire ne soit déclaré. Le dernier en date concernant ce pauvre PPDA qui les accumule ces temps-ci… Si cette affaire peut faire sourire (une ancienne maîtresse l’accuse d’avoir utilisé ses lettres d’amour, apparemment écrites avec les pieds, après l’en avoir a priori autorisé avant leur rupture…), celle concernant Michel Houellebecq et Wikipédia était moins risible, démontrant la stupidité de quelques intégristes incapable de différencier une simple information de type encyclopédique d’une oeuvre littéraire, sans parler du « plagiat psychique » que nous inventait Camille Laurens à l’encontre de sa consœur Darrieussecq en 2007. Même George Orwell a eu droit à son accusation, 60 ans plus tard : on lui reprochait ainsi d’avoir emprunté son intrigue et ses personnages à un ouvrage russe des années 1920, intitulé «Nous autres» d’un obscure Ievgueni Zamiatine. En cette rentrée littéraire de janvier 2011, paraît en France la traduction d’un premier roman, Axolotl Roadkill signée d’une jeune allemande de 17 ans, Hélène Hegemann, ayant défrayé la chronique pour son (soi-disant) talent, son jeune âge, mais aussi et surtout pour ses multiples emprunts à d’autres auteurs, dont fait nouveau : à un blogueur. A l’heure d’Internet, cette dernière, pur produit de la génération Facebook, estime que l’écriture est une démarche consistant à mixer différentes sources jusqu’à créer une nouvelle œuvre à partir de ce « mix » d’influences… :
Article mis à jour en mai 2021 :
« Je me sers partout où je peux trouver de l’inspiration et des choses qui me stimulent : films, musique, livres, peintures, photos, conversations, rêves. Peu importe où je prends les choses. Ce qui importe, c’est où je les porte. » a-t-elle ainsi déclaré.
Quand cette affaire a éclaté début 2010 (au même moment où Alina Reyes attaquait Haenel au même motif, décidément !), j’avais trouvé cette approche assez audacieuse et originale. Je l’ai même trouvée naturelle car après tout la littérature (et toute forme de création a priori), éternel recommencement, se nourrit, entre autres, des écrits des autres mais aussi de tout ce qui est vu, entendu, de tout ce qui l’entoure.
La littérature ne naît pas ex-nihilo et tout peut devenir matériau propre à la création, à l’inspiration. On ne peut pas interdire cela au risque de la tuer… « Tout écrivain est un lecteur, voire un coucou, qui se glisse dans les œuvres des autres pour mieux nicher la sienne. La question est de savoir si l’auteur parvient à dépasser l’imitation pour faire œuvre originale. » écrivait à juste titre Christine Ferniot dans un article sur le sujet (« Vols de plumes ») pour Télérama en 2008.
Paul Auster qui a longtemps traduit avant d’écrire sa propre œuvre, reconnaissait que « mâcher » le texte des autres lui a servi de tremplin en quelque sorte. « Quand on traduit, on est au cœur de l’œuvre: on en perçoit la musculature, le système sanguin, qu’on doit réinventer dans sa propre langue » expliquait-il et ajoutait : « Jusqu’à l’âge de 22 ans, je voulais écrire comme Hemingway ou Joyce… C’est un long travail d’apprentissage de devenir soi-même. J’avais quelque chose à dire et il fallait que je trouve la manière de le dire, de façon très directe. »
MAJ 2021 : Dans Orléans, Yann Moix aborde aussi ce thème alors qu’il retrace son initiation littéraire et la recherche douloureuse de son style, de sa voix, écrasé par ses mentors et références. Il évoque ainsi cette appropriation ou ce « transfert » qui s’effectue entre le lecteur et l’auteur de génie de sorte à se confondre presque:
Tout géant fini par nous faire rencontrer notre propre pouvoir cognitif et analytique, nous cédant généreusement la place au milieu de sa fulgurance, de son invention, de son intuition de sa découverte. Il nous offre ce merveilleux cadeau : nous susurrer que ces résultats qui sont ceux de l’intelligence humaine, appartiennent autant à celui qui les a obtenus et produits qu’à celui qui les a assimilés et compris. Tout ce que je lisais de profond finissait ainsi toujours par être de moi. C’est là sans doute, dans le domaine scientifique du moins, la diférence entre le génie et le talent. Le génie offre par l’universalité de son importance ses conclusions à l’humanité qui en a besoin ; le nom du génie devient alors sans que rien ne soit ôté de son prestige ni de son mérite ni de sa gloire, le nom générique de l’esprit humain. Le talent se partage moins, plus dépendant de sa source, plus arrimé à la personnalité du créateur, de l’inventeur (p.239).
L’essayiste américain, malin, en a même fait un best seller « Steal like an Artist » (2014) dans lequel il invite à pratiquer ces formes de « remix » comme voie créative.
Certes on me répliquera que cela s’apparente à du vol. Et un certain Marx répliquera que la propriété c’est du vol… 🙂
D’ailleurs dans l’Antiquité, puis au Moyen Age, avant la diffusion de l’imprimerie, le droit d’auteur n’existait pas : c’est l’apparition du texte imprimé qui a instauré cette notion de propriété d’une œuvre. Mais je ne verserai pas dans cet extrémisme !
Je pense tout simplement qu’il faut distinguer les emprunts, les sources d’inspiration au copié-collé à l’identique, notamment stylistique. Et ne pas crier au plagiat à tout va comme cela devient le cas ! De façon logique ce sont les grosses maisons d’édition habituées aux best-sellers qui sont les plus accusées. Ainsi un auteur qui vend à plus de 50000 exemplaires est le suspect parfait, plus de sous à empocher bien évidemment… Exemple avec Marc Levy attaqué deux fois en justice pour « Et si c’était vrai », mais la justice a considéré que ses thèmes appartenaient à une sorte de fond commun : un titre sans originalité (déjà utilisé dès 1934), le motif guère original d’une jeune femme inconsciente (ça a dû lui faire plaisir au passage !)…
Je me souviens pour ma part que lors du succès de « 99 francs » de Beigbeder, on s’était aussi échiné à lui trouver de « troublantes » ressemblances avec un obscur roman canadien (« Titre à suivre » de Marc Gendron). Mais si l’on a jamais entendu parler du second, c’est bien que le premier avait quelque chose en plus que son « histoire » (qui n’est jamais en littérature ce qui fait la valeur d’un texte de toute façon, n’en déplaise à certain(e)s…) ou son « décor » mais ce que l’on en fait.
Emprunter des idées voire des images et les réintroduire, les ré-écrire dans un autre contexte ce n’est pas faire de la copie bête et méchante (donc du plagiat au sens de contrefaçon). Il y a malgré tout une part de (re)création personnelle même si toute la difficulté est de s’affranchir de ses modèles d’admiration…
J’avais ainsi particulièrement été interpellée par le conseil -rusé et un brin amoral !- que donnait, sur ce sujet, Anaïs Nin à Henry Miller (dans « Correspondance passionnée »), un peu trop écrasé par l’oeuvre des autres : « S’il te plaît cesse de faire des citations complètes. Il apparaît clairement (…) que tu ne fais que révéler l’écrivain aux prises avec le processus de l’écriture. Cela me semble du plus haut intérêt. Mais ne révèle pas les sources exactes de l’alchimie par trop de citations. C’est très allemand (la passion des notes de bas de page). Ou bien reprends l’idée avec tes propres mots, ou alors cité de façon plus condensée (…) Sois un peu plus habile – ou encore digère un peu plus vite. J’entends par là : ne perd pas ton temps à critiquer les autres si ouvertement, même si c’est pour les contredire, ou pour les fuir. Parle en ton nom, toujours. C’est un manque de confiance en soi. Tu peux dire les choses aussi bien que Dostoïevski, Elie Faure ou tout écrivain que tu cites. Ose parler en ton nom. Laisse les autres nourrir ton sang, mais qu’ils demeurent sans visage, sans nom, dilués, mâchés par toi, reproduits,etc. Tu écoutes trop de voix. Ecoute seulement la tienne, et non ceux où tu mets en avant d’autres hommes. »
Extraordinaire non ? Tout est dit je crois, et comme par coïncidence, elle rattache ce penchant à la nationalité de la jeune Hegemann !
« Mon travail et mon plagiat deviennent authentiques dés que quelque chose touche mon âme. »
Or donc, dans son roman, « Axolotl Roadkill », Hegemann met pleinement en œuvre ce principe qu’elle revendique même comme une nouvelle forme littéraire à part entière.
Les « sources » sont ainsi dûment répertoriées à la fin du roman dans une annexe de près de 15 pages. Et l’on peut suivre en direct, au fil de la lecture d’où provient telle phrase ou tel passage en s’y reportant, comme une sorte de making-of de création littéraire. L’idée m’a amusée et intéressée et c’est avec une curiosité un peu malsaine que j’aimais découvrir « les dessous », les « secrets de fabrication » en quelque sorte, de l’écriture de l’écrivain, comparer la VO et la version retravaillée ou modifiée. C’est presque un exercice de style. On y trouve en vrac, outre le blog d’un jeune berlinois (Airen) qui relatait ses nuits décadentes, des emprunts à Kathy Acker, Foster Wallace jusqu’à Maurice Blanchot ou encore des paroles d’Archive, des dialogues de Jim Jarmusch… Mais aussi des extraits de correspondance privée par e-mail.
« Tout est vrai mais par moment la réalité est une arnaque. »
« Il faut que je coure à travers cette ville jusqu’à m’évanouir dans une mare d’essence, le diaphragme déchiré et ne pouvant plus qu’espèrer que quelqu’un laisse tomber par inadvertance une allumette dans la mare. »
Un joyeux melting pot qui s’assemble dans un récit en forme d’autofiction où règnent les dialogues et les SMS saupoudrés de réminiscences. On y suit, tant bien que mal le quotidien de la jeune Mifti, ado « perturbée » à la dérive, gosse de riche traumatisée et hantée par la mort d’une mère névrotique qui n’a pas su l’aimer et d’un père soixante-huitard irresponsable, « grandie à la sauvage », qui sèche les cours, traîne et s’ennuie dans les lofts de sa bande d’amis, parents de substitution, et de ses frère et sœur, s’enfile des lignes de speed et enchaîne les aventures (bi)sexuelles, emplies de sang et de vomi, dans les boîtes branchées de Berlin, dans une autodestruction consciencieuse. Bref, le cocktail désormais bien connu de la littérature white trash dorée et qui malheureusement n’apporte rien de nouveau sur le thème malgré une écriture et un découpage narratif qui se veulent conceptuels et avant-gardistes… Même un livre comme « Moi Christiane F, droguée, prostituée… », datant d’il y a plus de 30 ans, apparaît plus intéressant –et surtout plus attachant- que les froids borborygmes de la snob, désabusée et pseudo intello Mifti (qui rappelle un peu la Alison de McInerney dans « Toute ma vie » par sa verve et ses réparties), ce qui n’empêche pas quelques bonnes répliques -un brin définitives- de la « jeune prodige » : « Comme toutes les droguées mineures capables de réfléchir sur leur existence, ma tendance à fuir la réalité s’exprime par une passion pour la lecture en passant par les psychanalystes pakistanais jusqu’aux mémoires sur les rapports entre Moby Dick et le national-socialisme. » ou encore « La morale et la psychologie ne sont pas les instruments de travail adéquats pour s’atteler à la vie. »
J’ai aussi pu apprécier certaines de ses expressions comme : « Merde, merde, il doit y avoir un moyen d’exprimer ce que je ressens pour cette chanson sortie en titubant du cœur d’un musicien génial pour se diriger tout droit dans mes bras. »
De façon générale, l’écriture se veut « hallucinée », comme des « visions » par « flash », selon la tendance actuelle, et parfois donne lieu à quelques réussites oscillant entre poésie et slam urbain, même si demeure une impression de construction artificielle : « Et voici ma vie. Elle affiche une structure fine et cristallisée, elle est transparente et sa consistance varie selon la température, elle est floue, elle est un réservoir sous-marin percé auquel il faut échapper au plus vite, et tout à coup on traverse un troupeau de dangereux poissons carnassiers surdimensionnés à 500 mètres sous la surface de la mer. (…) Les entre mondes sont mon seul rapport à la réalité, (…) l’accès absolu à la vie. Je ne vois plus que des ondes bleu foncé, du fucus et des cachalots ocre aux gueules béantes. » Et de tenter l’exercice désormais classique depuis Burroughs, de la transcription littéraire des effets de la drogue avec en filigrane une réflexion sur le mal-être, plus ou moins maladroite : « l’héroine c’est comme un enfant, ta vie ne tourne plus qu’autour de ça et un jour tu te réveilles dans une baignoire pleine de merde qui est officiellement ton lit et tu n’es même plus capable de remettre en question la situation, encore moins de faire quelque chose pour y remédier. Etre accro à l’héro, c’est comme avoir des enfants, je t’assure. » ou encore « il tombe du ciel parsemé d’étoiles une pluie de bitume chaud qui me fait réaliser que je suis arrivée à mon plus bas niveau de désillusion et que je n’ai ainsi plus aucune chance de voir la situation prendre un tour libérateur. » .
Peut-être aurait-elle pu s’inspirer également des écrits, plus touchants, de l’écrivain chinoise Mian Mian qui dans ses bonbons chinois, sur le même thème, laissait « fondre la jarre rouge dans la tête » et « ajoutait quelques vitesses à l’existence« .
Et de régler ses comptes avec ses parents démissionnaires et désaxés, et de façon générale la famille génétique qui l’empoisonne: « Père, mère, enfant, pourquoi ne parvient-on pas à exterminer ce modèle familial barbare ? On n’en échappe que grâce au meurtre ou à l’assassinat. Bien que l’on soit liés par le sang, je viens soudain à réussir à démissionner de cette relation. Je n’ai plus de sœur, plus de frère, plus de père. Pour qu’une communauté fonctionne, il faut plus qu’une attitude bienveillante vis-à-vis d’elle. L’attitude bienveillante vis à vis d’un modèle ne fait pas sa réussite. »
Malgré finalement quelques bons voire beaux passages, reste au final, l’impression indigeste d’avoir lu une collection voire une anthologie de « bonnes phrases » accolées les unes aux autres, un peu comme une compétition, mais à laquelle il manque du liant, une cohésion qui permettrait d’entrer en profondeur dans ce texte très froid, qui tient finalement plus de la « performance », et non pas de rester en surface comme cela a été le cas pour moi… [Alexandra Galakof]
A lire aussi:
De l’importance du titre… (autour de la polémique « La carte et le territoire » de Michel Houellebecq)
24 Commentaires
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Le plagiat littèraire, un beau sujet sur lequel on peut effectivement épiloguer, malheureusement. Certes je n’ai lu que ce qui est écrit ci dessus du livre d’Hélène mais le sujet lui….
Plagiat à qui la faute ?
En premier lieu à ceux qui le pratiquent bien sur, mais l’honnêteté n’a jamais enrichi personne dit on, et comme le dieu profit régente tout , ceci peut expliquer cette cupide pratique d’hommes faibles pour résister à leur portefeuille, sans les disculper pour autant……
En second lieu,et surtout, à toute cette masse d’acteurs pros du livre (éditeurs de multinationales…critiques littèraires sous contrat etc etc) qui ,sentant le filon d’un fils de…ou d’un nom médiatique…ou politique n’ayant pas pour la plupart pas écrit lui même , préfèrent la sécurité monétaire à la probité et à l’aventure plus noble de la découverte d’auteurs plus anonymes (comme moi) qui écrivent seuls face à leurs pages blanches et ne peuvent que compter sur le bouche à bouche toujours plus long…
Le plagiat , comme la négritude littéraire, est née d’une course au gagnant à tout prix laissant la morale aux perdants…jusqu’à quand ?
Un petit mot de remerciement aux personnes ayant participées à l’inspiration d’un roman ou d’un scénario serait déjà sympathique, mais ce serait risquer devoir de l’argent j’imagine. C’est ce qui était choquant dans l’affaire Camille Laurens -Darrieussecq, l’absence de la petite phrase attentionnée en préface du livre. Plagier, c’est surtout très plouc mais cela rapporte. Ne pas donner le nom de son nègre littéraire, le cacher, en 2011, c’est pathétique et indigne. Mais cela rapporte.
Sinon "la Sagan berlinoise", je vois que les journalistes sont toujours aussi prévisibles dans leurs comparaisons en teflon. Comme Faïza Guène, la "Sagan des cités"… Tu noteras que les mecs qui publient à 17 ou 18 ans ne se font jamais comparer à Radiguet ou Rimbaud, c’est très cocasse.
[FB]
La pauvre, elle doit se retourner ds sa tombe… ca devient un nom commun maintenant "une (ou un d’ailleurs, cf : Sacha sperling à l’époque) sagan" accolé à n’importe quel auteur de moins de 20 ans…
[FB]
Il y a deux semaine j’ai lu un article concernant cette affaire dans le Livre Hebdo et du coup je me suis emparée du service de presse pour le lire. Je suis plutôt d’accord avec ton dernier paragraphe. Ca ressemble davantage à une "anthologie" qu’à une véritable histoire accouchée par un auteur unique.
[FB]
j’étais aussi très curieuse de découvrir ce texte, ce qui m’a surtout marquée (et déplu) c’est aussi la froideur de cet exercice de style, mais qui contrairement à un bret easton ellis ne prend pas aux trips, et nous -me- laisse juste de côté…
[FB]
Je vois parfaitement. Le fait d’être écartée d’un récit tranquillement assise sur la touche laisse un lourd sentiment de frustration. J’aime me sentir invitée mais pour le coup j’ai juste eu l’impression d’être courtoisement conviée ( parce qu-il le faut) à quelque chose qui ne souhaitait pas que je la regarde.
[FB]
> Virginie : oui c’est à peu près ça, pas d’empathie pour cette jeune fille et son mal-être… juste l’impression d’assister au numéro d’un petit singe savant… hélas !
> AK : Je ne crois pas que Marie Darrieussecq se soit spécialement inspirée de Camille Laurens, il y a beaucoup de livres/films, etc qui abordent le thème du deuil d’un enfant…
Voici une citations de Darrieussecq sur cette affaire :« Quelle outrecuidance de s’imaginer au centre de mon roman, de penser que j’ai écrit ce livre en pensant à elle et pas à ma mère ».
De façon générale, je crois qu’il faut distinguer : source(s) d’inspiration et influences (indispensable(s) à tout auteur et souvent assez mélangée(s) les unes aux autres, plus ou moins diffuses et/ou conscientes) et plagiat (copié-collé de phrases et/ou de paragraphes non sourcés).
Alexandra,la Revue littéraire avait selon moi fait son devoir. Je crois à la courtoisie; un petit mot de remerciement, une pensée, cela ne mange pas de pain et évite bien des blessures.
Dans un entretien paru en juin dans Livres Hebdo, Marie Darrieussecq affirmait pour sa part que la lecture de "Philippe" était l’une des raisons pour lesquelles elle avait choisi de se faire éditer chez P.O.L.
tempsreel.nouvelobs.com/a…
Dans ce cas, je crains qu’il ne faille revoir la totalité de la production littéraire, en priant les auteurs de citer et de remercier l’ensemble de leurs sources d’inspiration…
Pour ce qui est de Darrieussecq, il y en a plus d’une en tous les cas et aucune contrefaçon de style juridiquement reconnue si je ne me trompe pas.
Je rajoute une citation de Dantec, grand amateur de bibliographies à rallonge, qui fait écho à celle d’Helen Hegemann : « Ma littérature a été influencée par tout ce que mon cerveau a emmagasiné depuis ma naissance, et peut-être même avant. Musique, littérature, politique, métaphysique, sexe, drogues, guerres, sciences, comment aurais-je pu vivre à l’abri de ce monde ? Qui est à l’abri ? ».
n’est ce pas L.F. CELINE qui disait que les Hommes sont lourds et qu’il etait necessaire de se révolter contre cette lourdeur; eh bien le plagiat fait partie de "la lourdeur" ! quand on manque de style, de vécu on va pêcher la vie chez les autres; c’est un vol d’âme!
Mais cela se fait souvent Alexandra, certains auteurs ont une page pleine de remerciements.
Je suis d’accord mais tu ne peux pas obliger les auteurs à remercier tout ce qui a pu les inspirer d’une façon ou d’une autre, dans l’écriture de leur roman…
en ce qui concerne le thème du deuil/perte de l’enfant, pléthore d’oeuvres abordent ce thème…, encore un récemment là : http://www.buzz-litteraire.com/index.php?2011/02/01/1740-goncourt-du-premier-roman-2011) Encore une fois, l’accusation de "plagiat" correspond à une définition juridique bien précise et ce n’est pas une simple source d’inspiration parmi d’autres…
C’est du copié-collé (« contrefaçon »).
En fait, les 15 pages d’annexe n’ont été publié que dans la deuxième ou troisième édition. Hegemann a bien voulu cacher qu’elle avait copié presque tout son roman chez Airen. De plus il ne s’agit pas vraiment d’un ré-écrire.. elle a parfois copié mot par mot, phrase par phrase… Moi je trouve ça gênant.
A partir du moment où les sources sont citées, je ne trouve pas ça gênant, d’autant que lorsqu’on compare les différents emprunts, on réalise qu’elle les a en général bp retravaillés, transposés ou remodelés par fragments. C’est assez intéressant d’ailleurs de voir tout ce travail de réutilisation (bp plus intéressant que le livre ds sa globalité du reste, qui tient plus finalement de l’objet de curiosité !).
En l’occurence, ce qui est intéressant aussi c’est de se demander pourquoi le livre d’Airen a apparemment fait un flop et celui d’Hegemann un carton ?!
Là où le bât blesse (si j’ai bien suivi l’affaire), c’est que dans sa première édition Helene Hegemann s’était bien gardée de citer ses sources justement: Airen s’en est aperçu en découvrant le livre en librairie et l’éditeur d’Hegemann a dû réimprimer le livre en urgence avec toutes ses sources parce que d’autres commençaient à reconnaitre des extraits de films, d’autres livres ou de paroles de chansons… C’est quand même différent d’assumer un hommage sans se cacher direct et planquer le cadavre sous la neige en pensant que personne ne va le trouver au printemps. D’autant que sur le livre d’Hegemann le nombre d’emprunt est absolument dément, tu désosses le livre, ça couvre plus de la moitié.
Pourquoi le livre d’Airen a fait un flop? Je sais pas, une conjonction de choses: un éditeur qui a les moyens de faire une promo béton, un bon placement en librairie, le fait qu’un jeune écrivain de 17 ans fille appête plus facilement le chaland… Des injustices de ce genre il y en a des tas. Laurent Binet sort La vie professionnelle de Laurent B. en 2004 qui raconte son parcours de prof de français dans des lycées de banlieues diffciles et c’est mille fois meilleur, drôle, percutent et caustique qu’Entre les murs de Bégaudea qui est sorti deux ans après. Malheureusement c’est Bégaudeau qui a raflé la timbale avec le sien.
(heureusement que Binet s’est rattarpé ensuite avec HHhH…)
Alexandra, plagistes ou plagiaires? Telle est la question. A poil, veritas, veritatis, femina.
Oui, j’ai bien connaissance des faits mais mon propos n’était pas ici de juger "moralement" Hegemann (cela a déjà été fait, elle a reconnu, corrigé le tir dc affaire réglée a priori) mais plutôt d’analyser le "résultat" littéraire né du (re)mix de différentes sources d’inspiration listées comme telles.
Quand on regarde les extraits inspirés de ce blogueur Airen, ils ne st pas particulièrement marquants dans le livre j’ai trouvé, à part peut-être une métaphore ou deux.
Enfin de toute façon globalement le livre d’Hegemann ne fera pas date chez moi, on l’aura compris !
C’est plus le procédé de "remix" qui m’intéressait ainsi que l’utilisation littéraire de différentes sources d’inspiration dans un processus de nouvelle création.
Et puis cela aussi; http://www.lematin.ch/actu/suiss...
oui la même aventure était arrivée à deux autres blogueuses mode (Betty et Pandora) tjs avec Zara, récidiviste !
Contexte et cas différent de ce que j’évoquais ds mon billet néanmoins (contrefaçon pure et dure).
A voir aussi, une autre accusation dans le monde de l’image, clip versus photo, assez troublante et qui pose encore la question de la liberté d’inspiration (qui est finalement le vrai débat posé par mon billet : peut-on interdire la liberté d’inspiration ?) :
Le grand photographe David LaChapelle a porté plainte contre Rihanna, l’accusant d’avoir plagié son travail pour réaliser son clip controversé «S&M».
http://www.parismatch.com/Cultur...
(enfin, on va pas tous les énumérer car la liste est longue en matière d’attaques pour plagiat ds ts les domaines !)
à noter que les 15 pages qui repertorient les sources ont été ajoutées après parution du roman en Allemagne, suite à la polémique et aux accusations de plagiat… Quoique allemande Helene Hegemann n’avait pas à l’origine la ‘passion des notes de bas de page’…
Oui certes, mais mon billet ne visait pas à porter un jugement moral sur l’attitude d’Hegemann comme je le disais.
Ce qui m’intéresse plutôt ici c’est d’interroger la notion de liberté d’inspiration d’un auteur au sein d’un environnement culturel pré-existant, et le processus de création qui nait forcément de multiples influences, c’est en cela que je trouvais à l’origine la démarche et le discours d’Hegemann intéressant (tout en ayant trouvé son livre en lui-même inintéressant…).
J’ai l’impression qu’aujourd’hui cette liberté d’inspiration est condamnée, chacun défendant son pré carré avec un extrémisme procédurier qui me parait parfois démesuré (je ne parle pas spécialement d’Hegemann ici, bien que j’ai pu trouver parfois ds son livre, que sa prose était bien éloignée de ses sources d’inspiration…).
Ma question est donc : peut-on encore aujourd’hui s’inspirer d’autrui pour (re)créer ?
S’inspirer et plagier sont quand même normalement deux choses différentes…
Je serais ravie si mon petit Barney se retrouvait sur des T-shirt Zara! Je serais ravie de mon titre de muse et inspiratrice, totallement free of rights que ce soit pour les lettres ou l’image a priori. Cependant, je comprends cette sensation de viol psychologique mais il faut le vivre pour le comprendre je crois, c’est subtil. J’ai eu cette sensation il y a 2 ans, de cambriolage du moi interieur, sans savoir si j’avais tort ou raison d’ailleurs. Et sans chercher plus loin, en fuyant au plus loin. Mais je trouve cela grave, car cela peut susciter une pulsion de mort chez des personnes fragiles ou pauvres tout simplement.
Tant qu’on parle de citations : « La propriété, c’est le vol » n’est pas de Marx. Plutôt de Proudhon, son adversaire…