Après la vogue du blook (blog publié en livre par un éditeur), la publication à compte d’auteur (accusée d’arnaques en tout genre), le crowd-funding ou crowd-sourncing(plateformes de financement collaboratif d’auteurs), l’autoédition, initiée par le site Lulu.com, semble prendre un nouvel essor avec de nouvelles plateformes et quelques succès récents des deux côtés de l’Atlantique :
Si le système de l’autoédition peut paraître tentant aux refusés de l’édition traditionnelle ou pour les auteurs qui souhaitent tout maîtriser, en particuliers leurs droits d’auteur…, se pose toutefois la question de la promotion et de la visibilité de l’ouvrage après publication…
L’avènement de nouveaux acteurs, notamment la plateforme « Kindle Direct Publishing » (KDP) chez Amazon (ou ses concurrents l’Ibookstore author d’Apple, « PubIt » de Barnes & Noble ou plus récemment le nouveau « Kobo Writing Life » susceptible de rejoindre Fnac.com) et du développement de la lecture numérique contribuent à changer la donne. Adossées à de grandes librairies, elles permettent de s’auto-publier facilement tout en offrant une belle vitrine aux auteurs en quête de lecteurs. Quelques premiers succès ont de quoi les faire rêver. Pour l’instant ce sont surtout les polars, la SF ou la fantasy, genres plus populaires, qui se font remarquer.
La star française du moment, de l’autoédition numérique, s’appelle David D. Forrest (pseudo américanisant d’un écrivain nantais), journaliste spécialisé dans la presse de loisir – séries télé et jeux vidéo – par ailleurs. Cet admirateur de Maxime Chattam, adepte de SF (Lovecraft) et fantastique a signé un thriller froid et trash, « En série, Journal d’un tueur », qui décrit les pensées et pulsions d’un serial killer misogyne.
Ce best-seller s’est vendu à plus de 20 000 exemplaires, via les sites d’Amazon, Fnac.com et iTunes au prix de de 3,99 € puis de 2,99 € : figurait, il y a peu, à la quatrième place du top des ventes de livres numériques en France, entre Maupassant et Conan Doyle, loin devant les succès des librairies, signés Amélie Nothomb ou encore David Foenkinos.
Il est depuis détrôné par un certain Patrick Röhr, retraité de police, dans le même genre. Ce dernier a mis deux ans pour écrire ce premier livre (suivi depuis par quatre autres nouvelles dans la même veine toutes classées dans le top 100 des ventes).
L’autoédition est un choix car il ne souhaitait pas envoyer son texte à un éditeur.
Revers de la médaille : aucun suivi éditorial, pas de corrections ni de maquettiste pour la mise en page… Il faut tout faire soi-même : de la couverture à l’argumentaire. Sans oublier de fixer le prix de son ouvrage jusqu’à la diffusion (une plateforme comme Smashwords permet de centraliser la mise à disposition sur plusieurs boutiques internationales). Il affirme avoir gagné à peu près autant qu’un auteur vendant en librairie à 20€, après avoir reversé 30% de son bénéfice à Amazon.
Comment cela est-il possible ? Uniquement grâce au bouche à oreille : « Les critiques littéraires nous ignorent mais on se retrouve directement sous le feu des commentaires des lecteurs internautes. » a expliqué Forrest en interview.
Critiques qui sont d’ailleurs mitigées. Si certaines sont dythirambiques « Dévoré en un jour« , d’autres, presque aussi nombreuses, lui reprochent sa piètre qualité littéraire : « Ce Journal d’un tueur n’est qu’une coquille vide, un bel emballage avec un bandeau rouge en bas pour que ça se voie bien, qui nous dit que c’est « le best-seller numérique de 2011 », ou encore « Pour moi c’est un flop! Le sujet est quelconque. Le style ampoulé et approximatif. La syntaxe et la grammaire à revoir, notamment pour l’emploi des temps. »
C’est bien sûr aux Etats-Unis, privilège de la langue, que l’on trouve les succès les plus spectaculaires : d’Amanda Hocking, une parfaite inconnue de 26 ans, devenue millionseller en quelques mois avec sa trilogie « Trylle », alors que toutes les maisons d’édition l’avaient refusé à John Locke, un américain de 60 ans, ayant vendu plus d’1 million de copies de ses livres (9 polars et westerns au prix modique de 0.70€ ) au même titre qu’un Stieg Larsson, Michael Connelly ou James Patterson.
Amazon réserve d’ailleurs une place de choix à ses auteurs maison comme la jeune Jessica Parc (« Flat-Out Love ») qui a bénéficié d’une mise en avant sur sa page d’accueil, avec une lettre élogieuse signée par Jeff Bezos, himself.
Même si ces succès ne concernent qu’une minorité, tout comme dans l’édition traditionnelle du reste, ils montrent que ce système peut consituer une alternative sérieuse voire avantageuse… Du moins pour certains types d’ouvrages à bas prix… Pas certain qu’une littérature plus exigeante et moins commerciale trouverait son lectorat… pour l’instant du moins.
8 Commentaires
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« ces succès ne concernent qu’une minorité, tout comme dans l’édition traditionnelle du reste »
En effet! Et en France ça sera encore plus net quand des dizaines de milliers d’amateurs feront le choix des grandes plateformes commerciales: noyés dans la masse, visibilité quasi zéro, retour au point de départ. L’illusion du « je fais mon livre tout seul dans mon coin et je vais l’imposer au monde entier grâce à Amazon (ou autre) » ne tiendra pas longtemps.
Les plateformes associatives de « crowdfounding », si toutefois elles s’en donnent les moyens (avec des membres capables de s’impliquer dans de vrais critiques d’oeuvres et un système de sélection au point, pas un entrepôt à textes entassés comme on en voit si souvent), peuvent offrir une alternative autrement plus sérieuse.
de « crowdsourcing », Marc
« crowd sourcing »= partage de ressources/intermédiation sur un mode collaboratif comme une plateforme telle que welovewords.com
« crowd funding » = partage de fonds/financement collaboratif comme my major company books
sinon, je crois que le problème de visibilité que tu évoque Marc, est le même via l’édition traditionnelle, un grand nombre de romans passent inaperçus chaque année…
le boldu: arg, yes – sourcing, sourcing, sourcing
Le crowd funding, ça fait nom de pâtisserie anglaise, mélange de crumble et de pudding, avec tous ces petits fruits qui le composent, un peu sec ou trop compact, ça n’est pas très ragoûtant 🙂
Si le Buzz décidait de publier des livres électroniques, ainsi que d’autres plateformes web vouées à la littérature, cela pourrait fonctionner. Ce qui m’inquiète lorsque je me promène au milieu des Kindles, c’est que je n’arrive pas à voir la différence entre les livres auto édités et ceux publiés par un éditeur, or je n’ai pas confiance dans les livres auto édités tant qu’ils n’ont pas reçu l’aval de journalistes ou professionnels. On pourrait imaginer que des magazines littéraire, féminins ou autres publient leurs kindles ou du moins qu’il y ait une rubrique kindles dans les critiques livres. Pour ce qui est des musiciens, je remarque que mes coups de coeur sont auto édités sur itunes (Kate Sikora du Japon/ Wonderful princess, etc.)
Comme évoqué dans cet article, le « pb » pour l’instant des livres autopubliés sur ce type de plateforme reste leur piètre qualité littéraire (cf les remarques des lecteurs sur amazon), ce qui explique que les médias ne s’y intéressent pas sauf en tant que « phénomène » (ce qui ne les empêche pas de connaître un succès commercial, de même que tout un pan de la littérature dite « de gare » ou encore « du terroir » qui se vend très bien tout en étant parfaitement ignorée de la presse par exemple…)
Bonjour,
Dans un premier temps, merci pour votre article très complet et surtout très enrichissant ! Je suis actuellement en pleine réflexion à ce sujet pour mon premier roman et justement je me demandais s’il était intéressant de faire tout soi-même sur Amazon, j’ai l’impression que c’est une usine à gaz, ou de confier une partie du travail à des professionnels. Je suis de Nice et j’ai eu connaissance de Pumbo qui, justement, aide les auteurs à auto-éditer leur livre. Que me conseillez-vous pour la première fois ?
Merci à vous pour votre réponse et très bonne continuation !
Ju’.