Dans le sillage d’une lycéenne en 2014, une prof de français d’un lycée d’Alfortville lançait en mai 2016 une pétition « Pour donner leur place aux femmes dans les programmes de littérature du bac L », sur change.org. Adressé à la ministre de l’Education nationale, Najat Vallaud-Belkacem, le texte souligne que «jamais une auteur femme n’a été au programme de littérature en terminale L». Une requête qui aura été entendue puisqu’en 2018, un premier pas sera franchi avec l’étude d’une oeuvre de Mme de La Fayette.
« Je suis si persusadée que l’amour est une chose incommode, que j’ai de la joie que votre père et moi-même en ayons été exempts », confie la marquise de Mézières à sa fille en lui conseillant de se marier.
Il s’agit de sa nouvelle La princesse de Montpensier, quadrille amoureux sur fond de guerre de religion et de dilemme moral -déchirement entre devoir et passion-, 1e oeuvre publiée en 1663 qui préfigure sa célèbre princesse de Clèves qui suivra en 1678. La romancière du siècle considérée comme pionnière du roman pyschologique. Elle disait aspirer à ce que « sous la pudeur aristocratique, s’exprime le désir de se faire le juste écho d’une société d’honnêtes gens occupés avec passion à ne pas être dupes des apparences ». L’oeuvre sera étudiée en parallèle de son adaptation cinématographique par Bertrand Tavernier, en 2010 et de Les Faux-Monnayeurs d’André Gide. « Le professeur aura soin d’inscrire chacune des deux œuvres dans son contexte socioculturel et artistique spécifique, afin de favoriser leur dialogue mais aussi leur confrontation », indique la note de service publiée dans le Bulletin officiel de l’éducation nationale.
Au sujet du personnage central de Marie, un caractère fort et indépendant qui agit comme moteur des intrigues et des actions, Mélanie Thierry qui l’incarne commentait : « Marie n’est pas du genre à suivre le troupeau et elle aime pouvoir affirmer ses idées et ses opinions. Elle a aussi besoin d’avoir accès à la culture et de se sentir exister ! C’est une jeune femme complexe déchirée entre, d’un côté, une droiture raisonnée qui la pousse à être une bonne épouse et, de l’autre, le désir et la sensualité auprès de son amant. (…) En réalité, elle n’est pas du tout consciente de sa beauté et de son pouvoir de séduction. Elle n’est jamais dans le calcul« .
On espère que cela ne sera que le début d’une plus grande féminisation des auteurs au bac et dans les programmes scolaires. Comme le rappelait la pétition l’oeuvre des femmes est riche :
«Nous aimerions que les grandes écrivaines comme Marguerite Duras, Mme de Lafayette, Annie Ernaux, Marguerite Yourcenar, Nathalie Sarraute, Simone de Beauvoir, George Sand, Louise Labbé… soient aussi régulièrement un objet d’étude pour nos élèves»
D’autant que plus généralement depuis 2003, seules les œuvres de trois femmes sont tombées au bac, pour 77 auteurs masculins ! Encore pire, l’agrégation de lettres n’a vue que deux femmes proposées au programme de littérature du Moyen-Âge depuis 1981 », à savoir Marie de France en 1996 et, cette année, Christine de Pizan, selon le communiqué de la ministre de l’éducation.
[ A lire sur un sujet connexe ]
Manuels scolaires, critiques littéraires et Wikipédia…: les femmes toujours sous représentées
« Grand écrivain au féminin » : la bataille de la visibilité
4 idées reçues sur l’invisibilité des écrivains femmes à l’école
Derniers commentaires