Buzz littéraire

Articles de cet auteur

Lulu.com, le site d’auto-publication drague les journalistes… (et réflexion sur l’édition en ligne indépendante)

De part et d’autre, on entend, lit ou reçoit les complaintes voire cris de détresse des auteurs wanna-be désespérant de trouver éditeur à leurs précieuses pages ! Cet acharnement peut parfois étonner quelque peu. Le plus important n’est-il pas de trouver des lecteurs ? Certes, me direz-vous mais sans éditeur comment faire ? Le fameux dilemme de l’oeuf et de la poule ! Pourtant, aujourd’hui il serait -presque possible- de s’affranchir des éditeurs qui ne sont plus les seuls sésames pour être lu.
Après tout, lorsqu’on sait qu’un premier roman (d’un auteur inconnu) ne recueillerait qu’une moyenne de 500 lecteurs (comme le déplorait l’éditeur Christian Bourgois dans un entretien du « Monde des livres » d’avril 2007) on se dit qu’un blogueur, même avec une audience de base (entre 500 et 1000 lecteurs/jour), aurait plus vite fait de « surfer » sur sa petite notoriété acquise en ligne pour lancer lui-même son roman (ou livre de façon générale).

Interview de Vincent Ravalec (+ « Hépatite C » et « PEP : Projet d’éducation prioritaire ») / Salon du livre 2007 (4/6)

Quatrième étape haute en couleurs de nos rencontres avec les auteurs du Salon du livre dernier à Paris, avec le nouveau visage de Vincent Ravalec. Avec « Les filles sont bêtes et les garçons sont idiots », l’écrivain éclectique confirme la nouvelle trajectoire que prend son écriture et les terrains qu’elle explore. L’auteur, considéré comme chef de file de « la littérature nouvelle génération » lors de la pulication d’Un pur moment de rock’n’roll, son premier recueil de nouvelles (1992) qui l’a sorti de l’ombre (et lui valut le prix de Flore), puis en 1994 de « Cantique de la racaille » (ré-édité en mars 2006, J’ai lu) a délaissé son humour noir et son univers fait de loosers déjantés et autres petites frappes malchanceuses, cessé de décrypter les mystères du chamanisme et fait une volte-face avec une collection de livre frais et tout aussi truculents, pour les adolescents… comme pour leurs parents !

« Le coeur cousu » de Carole Martinez

Coup de coeur pour ce premier roman, à la puissance lyrique rare, de Carole Martinez une parisienne d’une quarantaine d’années, professeur de français à Issy-les-Moulineaux, qui avait déposé son manuscrit alors inachevé chez Gallimard, à l’accueil. Coup de foudre de Jean-Marie Laclavetine : «Ne changez rien, écrivez la fin», lui a-t-il dit, selon l’anecdote rapportée par le Nouvel observateur. Le prix Ouest-France -Etonnants Voyageurs ainsi que le prix Emmanuel-Roblès ne s’y sont pas trompés non plus en lui décernant leurs récompenses. Elle est également sélectionnée dans la prestigieuse liste des livres d’été des membres de l’Académie Goncourt. Un succès façon « L’élégance du hérisson » (de M.Barbery) ne serait pas surprenant…

« Podium » de Yann Moix, Vivre (et mourir) à travers l’Autre

Qui n’a pas entendu parler de « Podium », le grand succès de Yann Moix paru en 2002 et adapté au cinéma (par lui-même) en 2004 avec force matraquage médiatique ? Vu de l’extérieur, l’ensemble laisse redouter la grosse comédie de boulevard à grosses ficelles commerciales. De plus, « une histoire de sosies de Claude François » n’est pas forcément très attrayante… Sans être un chef d’oeuvre, « Podium » est un roman bourré d’énergie et d’inventivité qui explore sous ses apparences burlesques et parfois un peu excessives, les thèmes de l’identité, du fanatisme, des rêves d’enfance et de la nostalgie…

Les conseils de « creative writing » de Laura Kasischke

« Le conseil que je donne à mes étudiants est de toujours écrire sur les points sensibles, les points de conflit, en ne cessant pas de les reconsidérer jusqu’à ce qu’une ébauche complète soit sur la table. Je trouve que beaucoup d’auteurs sont des perfectionnistes, et que c’est généralement inutile ! En outre, je dis à …

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Quand l’Académie française s’intéresse aux blogs littéraires… (L’Académie des blogs de David Abiker et Elodie Courtejoie)

En février dernier le journaliste David Abiker, animateur de l’émission Blog à part sur France Inter, chroniqueur de l’émission « Arrêt sur Image » aux côtés de Daniel Schneidermann ou encore blogueur sur le Big Bang Blog et auteur de 2 romans (dont « Le musée de l’homme« ), a convié le Buzz littéraire à sa nouvelle émission « L’académie des blogs » diffusée sur la radio… de l’Académie française (et de l’institut de France de façon plus générale). Une initiative originale et assez inattendue de la part de cette vénérable Institution que l’on pourrait imaginer un brin poussiéreuse. Mais il n’en est rien comme l’explique très bien Elodie Courtejoie la co-équipière impertinente de David Abiker (en photo ci-contre) dans cette émission. Le principe ? Donner la parole aux acteurs de la blogosphère littéraire (éditeur, journaliste, polémiste, auteur…) pour présenter leurs blog et approche respective. Je me suis donc prêtée à l’exercice avec plaisir et profité de l’occasion pour interviewer ces deux animateurs de choc (voir vidéos ci-dessous) qui nous dévoilent les coulisses de cette radio pas comme les autres :

« Strip-tease » de Joe Matt, Portrait de l’artiste en jeune trentenaire looser…

Si vous ne connaissez pas encore « Strip-tease » de Joe Matt, cet auteur-dessinateur québecois, chef de file de la nouvelle BD intimiste canadienne aux côtés de Seth (qui signe d’ailleurs sa post-face) et Chester Brown et que vous affectionnez les anti-héros, virtuoses de la loose et du pathétisme quotidien, alors jetez-vous sur ce roman graphique! Comme son nom l’indique l’auteur, alors fraîchement sorti des Beaux-Arts et coloriste sur la série Grendel de Matt Wagner, s’y met à nu (et en scène), avec une force d’autodérision jubilatoire.

Désaffection de la filière littéraire (Bac L 2007)

En 1968, un bac sur deux était littéraire, aujourd’hui, il n’y en a plus que 18 %. Un phénomène qui n’a cessé de s’accélérer au cours des dernières années.
Au point qu’en décembre 2006, les inspections générales de l’éducation nationale, dans un rapport intitulé « Evaluation des mesures prises pour revaloriser la série littéraire au lycée », estimait que la « série littéraire était menacée d’une extinction rapide ».

Sélection sorties livres de poche : à emporter cet été sur votre serviette ? (+ sélection été Académie Goncourt et l’Eté des libraires)

Présentés ou évoqués il y a quelques temps, voici une petite sélection des sorties poches récentes. Plus d’excuses pour ne pas les découvrir ! Roman d’adolescence avec « Serpents et piercings » d’Hitomi Kanahera (voir chronique) qui analyse le lien entre rapports amoureux et meurtrissure des corps de la jeunesse Tokyoite, jusqu’au recueil sur la maternité moderne « Naissances (voir chronique) » qui réunit une pléiade de plumes féminines actuelles (Marie Darrieussecq, Hélèna Villovitch, Agnès Desarthe, Marie Desplechin, Camille Laurens, Geneviève Brisac, Catherine Cusset et Michèle Fitoussi) à la fois mères et romancières. Mise à jour : les listes de livres d’été de l’Académie Goncourt et de « l’Eté des libraires » :

« Le grenier » de Claire Castillon, La passion amoureuse à ventre et à cris

« Le grenier » de Claire Castillon, c’est avec ce premier roman que l’auteur parisienne, alors âgée de 24 ans, titulaire d’un DEUG de lettres, est officiellement entrée en littérature. Officiellement car jusqu’ici elle écrivait déjà, mais à visage masqué, les romans des autres. Un travail alimentaire frustrant pour l’impétueuse romancière à la plume fébrile. Un premier roman en forme d’autofiction même si le terme ne veut pas dire grand-chose, presque de confession aux accents freudiens. Un « livre sur rien » comme certains qualifient les romans intimistes, et comme elle l’écrit ironiquement, dans l’une de ses pages comme si elle anticipait déjà le verdict des bien-pensants: « Des livres qui ne racontent pas d’histoire, qui divulguent deux trois états d’âme. » Sauf que « Le grenier » est tout sauf un livre sur « rien ». Il est au contraire « plein » ce grenier, empli de (douloureux) souvenirs d’enfance, de monstres, de colère, de violence, de jalousies, d’un besoin désespéré d’amour, de désir, de paillettes et de dégueulis…

« Boborama » de David Angevin, une tentative de 99 francs dans les coulisses de la presse en général et de Télérama en particulier

Que faire quand votre boîte vous insupporte et que vous sentez la rupture de contrat proche ? Ecrire un livre pardi ! Frédéric Beigbeder a inauguré la tendance avec brio en 2000 avec son caustique et drôlatique 99 francs sur le monde des pubeux. David Angevin ancien journaliste de Télérama de 35 ans, a tenté, dans son sillage, en 2006, de dépeindre les coulisses des journaleux et plus particulièrement la face cachée de la célèbre bible culturelle « catho-gaucho-bobo » des profs socialistes et d’une certaine « élite française » de l’Ile de Ré à l’île Saint-Louis, répondant au doux pseudonyme de « Boborama ». Toute ressemblance avec des faits réels serait fortuite of course ! Il livre donc sa vision de l’intérieur d’un système qui attise bien des convoitises mais génére aussi bien des désillusions. Si l’idée de départ aiguise la curiosité (et aurait fait grincer des dents), le traitement s’avère un peu décevant même si demeurent de bons passages… A noter que l’auteur devrait publier courant 2007 un nouveau roman (comédie familiale).

« L’ombilic des Limbes » et « Le Pèse-Nerfs » d’Antonin Artaud, Poétique de la douleur

« Là où d’autres proposent des oeuvres, je ne prétends pas autre chose que de montrer mon esprit », écrit Artaud, « le poète maudit », en préambule de « L’ombilic des Limbes ». Et posant cela, il dit toute l’essence de son oeuvre et de ses poèmes. Anarchie, désordre, délire et surtout quête de lui-même, de l’esprit et de la réalité hantent ses pages et ses mots. L’impossible harmonie entre son corps et sa pensée et la difficulté à trouver le sens de l’être le conduiront à être interné pendant 9 ans en hôpital psychiatrique (notamment à Rodez où il subit les électrochocs dans les années 40).

Céline Minard, J. G. Ballard, Lolita Pille, Philippe Jaenada… auscultent notre futur dans Standard

Le magazine Standard nous fait suivre le sommaire alléchant de son nouveau numéro « Spécial Anticipation » : Eté 2037 Numéro 100. Puisque l’avenir appartient à celui qui a la plus longue mémoire, Standard Magazine, la revue culture & mode prévue par Friedrich Nietzsche, fait briller sa boule de cristal. Au générique : Le post-humain On a tous à y gagner ; Sean Lennon « Prédictions inédites et cerveaux infinis », « Fémis Le cinéma d’après sans lunettes 3D », », Céline Minard « Le dernier homme sur Terre est une femme » ; Algérie Soleil vert pour toute l’Europe ? ; Philippe Jaenada envisage demain comme Bergson; Bizot & Moreira Anticipez la nouvelle ère médiatique en jogging ; J. G. Ballard nous envoie un fax ; Alain Robbe-Grillet Immortel ! ; Alan Vega Du punk centriste ? ; Eddy Mitchell Trente-trois heures sur la Lune ; Catastrophe évitée L’astéroïde Apophis dévié par nos blouses blanches.
Enfin « La vérité sur les Pékinoises boudeuses et le yak tibétain. »
Sans oublier : Charles Bukowski / Lola Doillon / Paule Ka / Wilco / Norman Spinrad & Nicolas Moulin / Mum / Lolita Pille, Anna Borrel, Céline Curiol, Luc Fivet / Blonde Redhead / Manish Arora & Gareth Pugh / Pascal Comelade / France Fiction. Découvrez quelques extraits :

Maman, j’écris ton nom… (La « mère » en littérature)

Nous fêtions dimanche dernier nos mamans. La maman, la mère : ce personnage, cette icône, hautement littéraire et romanesque, a inspiré et inspire de nombreux auteurs d’hier et d’aujourd’hui. Hommage ou réglement de compte, mère chérie ou honnie, envahissante, absente ou dévouée, elle déchaîne les passions et hante les imaginaires honteux, reconnaissant, culpabilisant ou nostalgique des écrivains. De toute les générations et époques, ils ont tenté d’écrire leur relation ou « non relation » avec celle qui leur a donné la vie, en puisant dans le vif de leur enfance. Quelle importance en effet elle tient dans notre vie ! Déterminante sans doute. Une maman est celle qui vous donne votre premier livre, vous ouvre vos premières pages et vous fait découvrir un monde peuplé de géants, d’ogres, de renard rusé, de petit garçon en bois avalé par un cachalot (vous vous demanderez longtemps « comment c’est d’être dans le ventre d’un cachalot »), de chocolaterie, de montagne ou d’haricot magique… C’est une maman qui vous donnera un jour sa bibliothèque rose et verte, dont les chapitres jaunis vous tiendront éveillée si tard la nuit que votre grand-mère aura peur que vous ne vous « abîmiez les yeux ». C’est une maman qui vous donne ce goût, cette imagination là, qui a cette patience de lire à voix haute, avec le ton, de suivre avec son doigt les lignes que vous déchiffrez, très vite, naturellement (alors que vous pleurerez toutes les larmes de votre corps pour faire vos additions…).

« Falaises » d’Olivier Adam : L’écume des nuits

Le dernier mot de « Falaises » d’Olivier Adam est « lumineux ». Et c’est peut-être cet adjectif qu’il faut garder pour décrire le cinquième roman, en lice pour le Goncourt 2005, de cet écrivain à part à la sensibilité écorchée. Une lumière violente, âpre, tout en claire-obscure qui déchire les nuits « noires et profondes comme le monde », parvient à se faufiler à travers l’ombre des falaises qui « se découpent dans le tissus du ciel »… Une lumière, celle de la vie qui continue d’avoir le dessus malgré la tragédie, l’acharnement du destin, le manque et le chagrin…

La séduction ou comment réduire les distances, par Frédéric Beigbeder (extrait de « L’amour dure 3 ans »)

Et si séduire dans une fête n’était qu’une question d’arithmétique… A vos double-décimètres !

De la rupture de Gabriel Matzneff, Hommage à la « rupture féconde »

« De la rupture » de Gabriel Matzneff fait partie du volet des essais de l’auteur (qui en a écrit une petite douzaine, dont le très controversé « Les moins de 16 ans »). Publié en 1997, il aborde comme son nom l’indique le thème de la rupture au sens large, amoureuse principalement bien sûr mais aussi amicale, « matérielle » (aux objets, aux lieux) ou encore aux changement de vie (un goinfre se met à la diététique, un mondain entre dans les ordres…) jusqu’à la plus grande rupture, celle de la mort.

Message à l’enfant qui ne doit pas naître, (extrait du Journal d’Anaïs Nin, 1932-1934)

Dans l’un des sept tomes les plus passionnants de ses journaux, dans l’entre deux guerres, marqué de ses rencontres et amours avec des figures mythiques de la littérature allant d’Henry Miller à Antonin Artaud (ou encore sa correspondance avec D-H Lawrence sur qui elle a rédigé un essai) et de de la psychanalyse (René Allendy, Otto Rank…), dans le Paris montparnassien des années 3O, Anaïs Nin, alors âgée de 30 ans va également faire la douloureuse expérience de l’avortement. Celle qui disait « J’ai déjà trop d’enfants. Il y a trop d’hommes sans espoir et sans foi dans le monde. Trop de travail à faire, trop de monde à servir, aider. J’ai déjà plus que je ne peux porter. » , va devoir se résoudre à faire disparaître, par amour des hommes et de l’art, ce petit être qui vit déjà en elle. Elle écrit à ce sujet un monologue poignant pour cet enfant qui ne doit pas naître :

Politique et littérature (2) : Arnaud Cathrine, Louis Ferdinand Céline, Richard Millet et Jean-Marc Roberts

Quelques propos intéressants extraits du texte rédigé par Arnaud Cathrine pour le hors série de Technikart « Les 10 écrivains de demain » (mars 2007) qui font écho au billet Politique et littérature précédemment publié. En complément une citation de Céline qui rejoint aussi cette approche en prônant la suprématie du style sur les idées en littérature et un extrait d’une interview sur ce thème donnée par Richard Millet et Jean-Marc Roberts au Figaro en réaction à ces discours inquiétants sur la « littérature-monde » ou l’occupation du terrain politico-politicien des romanciers…

La Nausée de Jean-Paul Sartre, précurseur du roman « dépressif » ?

A la relecture d’un classique tel que « La nausée »*, le premier (et célébrissime) roman de Jean-Paul Sartre, publié en 1938 et écrit pendant ses années de professorat au Havre, on réalise que les critiques contemporaines sur le « roman dépressif » français à la Houellebecq, pourraient tout aussi bien s’appliquer à ce désormais grand auteur incontesté (mais aussi à un « Voyage au bout de la nuit » de Céline, roman ayant d’ailleurs profondément marqué Sartre et dont un extrait est cité en exergue).