Lauren Oliver fait partie de cette nouvelle génération d’auteurs de romans ados dits « young adult » selon l’appellation anglo-saxonne capable de produire des best-sellers à la chaîne avec des univers semi-fantastiques dystopiques et de jeunes héroïnes souvent lycéennes confrontées à diverses épreuves et leçons de vie. Aux côtés de Suzanne Collins (The Hunger Games) et de Veronica Roth (Divergent), elle truste le palmarès des best-sellers du New York Times.
Le premier roman de cette fan des Misérables, Before I fall (Le dernier jour de ma vie en VF), l’histoire d’une lycéenne populaire qui meurt dans un accident de voiture et revivra plusieurs fois d’affilée la journée de cette mort qui lui feront appréhender différemment ses valeurs et changer de mentalité, paru en 2010 sort au cinéma en ce mois de mars 2017. Anecdote amusante : écrit à la petite vingtaine, la jeune femme partageait alors son temps entre 2 jobs et ses études et ne trouvait le temps d’écrire que dans le métro en tapant ses chapitres sur son tél portable ! Elle dit avoir inspiré par sa propre expérience au lycée et « la croyance profonde que personne n’est trop mauvais pour ne pas pouvoir se « refaire », se « racheter » intégralement« .
Dans Delirium, aux réminiscences de Brave New World (Le meilleur des mondes en VF), elle imaginait une ado qui tombe amoureuse dans un monde où l’amour est une maladie baptisée amor deliria nervosa contre laquelle chacun doit s’immuniser. Une particularité intéressante d’Oliver, titulaire d’un master en creative writing de l’université de New-York en et qui a une expérience en tant qu’assistante éditorial chez Penguin, est son implication dans l’aide aux jeunes auteurs dans l’écriture de leurs romans. Elle a même fondé une agence de conseil littéraire (Paper Lantern Lit) qui forme et recrute des auteurs pour développer diverses idées narratives. Un « incubateur » ou « architecte » littéraire selon sa définition. Une vraie petite usine à produire du best-seller en somme (un peu sur le modèle d’Alloy Entertainment qui a notamment développé Pretty little liars dans le même genre ; l’entreprise pratique une sorte d’écriture collective comparable à un pool scénaristique, entre un auteur et une équipe de commanditaires à partir d’un pitch pré-établi, pour produire une série de livres destinés à être adaptés ensuite en série TV ou film)…
En outre très active sur Youtube, elle a lancé une série de vidéos partageant de nombreux conseils d’écriture et sur son expérience d’écrivain. Traumatisée par les premiers rejets de ses manuscrits au motif qu’ils manquaient de « structure » ou d’une « vraie histoire », elle a développé une passion/obsession pour la construction d’une « intrigue » efficace et solide. C’est son expérience dans l’édition qui lui a appris à « raconter une histoire, et pas seulement écrire des descriptions de personnages et de jolies phrases » scande-t-elle d’interview en interview. A l’époque, elle nourrissait d’ailleurs le préjugé habituel contre la fiction jeunesse qui la catalogue comme trop « simpliste » pour être littéraire. Jusqu’à ce qu’elle se décide à apprivoiser l’art de ses intrigues efficaces afin de se faire publier. Sa vision très calibrée, voire formatée ou mathématique, de (ficelles/recettes) l’écriture façon « story-telling » pourra heurter la conception française plus artistique et libre sur ce plan là (même si un Willy -Gauthier Villars-, 1e mari de Colette était précurseur de ses « ateliers » à romans populaires qui ont formé l’auteur des Claudine fin XIXe, début XXe s.). Il n’en reste pas moins intéressant de découvrir voire de s’inspirer de certains de ses « secrets de fabrication » en particulier si on aspire à écrire une oeuvre de ce genre (qu’Oliver défend ardemment, voir sa tribune) :
Conseils d’écriture de Lauren Oliver, auteur à succès de fiction jeunesse « young adult » (Delirium, Before I fall, etc.)
Voici quelques uns de ses -nombreux- conseils d’écriture disséminés sur la toile (voir entre autres sa chaîne Youtube, une mine !) :
Remember that even if you only wrote a page a day, you would have a 360 page book in just a year! (Souvenez-vous que même si vous n’écrivez qu’une page par jour, vous obtiendrez un livre de 360 pages en juste une année !)
Comment trouver l’inspiration ?
Elle recommande pour trouver l’inspiration de rester connecté au monde réel, de lire beaucoup la presse, les faits divers étranges notamment, de façon générale lire beaucoup. Oliver confie qu’elle aime se lancer des défis en partant du sujet d’un article et s’imaginer comment le transformer en histoire ou roman. Autre astuce : éteindre son ipod ! Ecrire est une question de personnes, comment les gens communiquent, se comportent et interagissent. On ne peut apprendre des gens qu’à travers l’observation, donc plutôt que d’augmenter le son de vos écouteurs quand vous êtes dans les transports en commun ou dans la rue, apprenez à écouter autour de vous. Cultivez l’art délicat d’écouter aux portes et d’espionnage des gens tout en prétendant regarder dans le vide. C’est aussi en écrivant que vient l’inspiration, les pensées se nourrissant entre-elles et un fait, une réplique en entraînant un(e) autre.
Exercer son imagination
Lauren Oliver voit l’imagination comme une compétence qui peut être renforcée par l’habitude et à l’inverse s’atrophier, comme lorsqu’on reste avachi sur un canapé. S’abrutir de télévision et de surfs sans fin sur le web lui sont particulièrement nocifs. Il est tellement facile de nos jours de se réfugier dans des mondes déjà imaginés par d’autres dans les livres, films, vidéos Youtube, etc. Mais cela signifie que notre capacité à imaginer
ne travaille plus. Son conseil : couper les écrans, tablettes et ordinateurs pendant une journée pour ressentir cette démangeaison folle et brûlante de « faire quelque chose » parce que la vraie vie est ennuyeuse. Mettez-vous à rêvasser, à fantasmer. Imaginez-vous dans la peau de différents personnages et différents mondes.
Détendre ses neurones !
Oliver constate qu’étrangement la moitié de ses idées innovantes lui sont venues quand elle était à la salle de sport ou au cours d’un jogging. Elle l’explique par la détente cérébrale procurée par ces activités
Le cerveau est habituellement dominé par ses préoccupations quotidiennes comme les factures, les dîner, les problèmes relationnels, les projets futurs. Le fait de se détacher de ses inquiétudes conscientes permette au subconscieny de se mettre à faire fuser les idées
Si vous n’êtes pas fan de la course à pied, vous pouvez essayer le yoga ou le tricot, ou n’importe quoi de manuel/physique et répétitif qui permet à votre esprit conscient de se mettre en pause.
Une bonne douche marche aussi !
Writing is like a muscle, that grows stronger the more you practice it.
Comment vaincre l’angoisse de la page blanche ?
C’est essentiellement une question de discipline qui est clé dans l’écriture d’un livre. Elle insiste sur la nécessité d’écrire un peu tous les jours, de cultiver cette habitude au quotidien, et de refuser toutes les excuses que l’on se cherche pour ne pas s’y mettre. Pour elle l’angoisse de la page blanche est surtout la manifestation d’une résistance naturelle à tout travail créatif et d’écriture. De plus, cette peur advient souvent lorsque l’on ne sait pas vraiment où notre récit est censé aller. Une façon d’y pallier est alors de passer un bon moment à le structurer dans un plan détaillé.
Un autre problème qui doit être surmonté ici est de ne pas laisser sa « voix critique » intérieure prendre le pas sur la voix créative en ne cessant de penser que ce que l’on écrit est mauvais, terrible, que l’on a pas d’idées intéressantes, etc. Il faut alors se rappeler que l’on a pas à écrire quelque chose de « bon » la première fois ou même les 27 premières fois. ce qui compte c’est de jouer avec les mots, la narration, il faut essayer de s’amuser avant tout. Donc, essayer de relâcher la pression et faire taire cette voix critique étouffante est très important dans le processus créatif. Selon Lauren Oliver, mieux vaut toujours écrire quelque chose de mauvais que de rien écrire du tout, car il existe toujours la possibilité d’améliorer et de retravailler ses écrits par la suite. Ceci fait écho à l’adage très juste de Jodi Picoult (auteur de « Il faut qu’on parle de Kevin » entre autres) : « Tu peux toujours retravailler une mauvaise page. Tu ne peux pas retravailler une page blanche » ( « You might not write well every day, but you can always edit a bad page. You can’t edit a blank page. »). En un mot : il faut souvent se « forcer » à écrire, même lorsqu’on est pas d’humeur car l’écriture est comme un muscle qui se développe au fur et à mesure que l’on pratique.
Comment construire une histoire/intrigue solide ?
L.Oliver aime rentrer progressivement dans l’écriture de mes livres. Elle écrit habituellement environ 20000 mots librement afin de faire connaissance avec les personnages et leur univers. Sa méthode d’écriture est assez impressionniste : elle écrit tout un tas de choses de façon éparse sans trop savoir comment elles vont s’imbriquer, ensuite, elle se pose et écrits un plan très détaillé. Sa méthode d’écriture est donc de toujours écrire librement pour s’imprégner du décor et des personnages puis de réfélchir à la structure globale. Pendant la période de révision, elle s’attarde ensuite au niveau micro de chaque phrase en tant que telle qu’elle lit à voix haute et n’hésite pas à couper si besoin. Elle indique ne commencer un roman que très rarement un roman avec un plan précis, mais toujours en élaborer un ultérieurement sous peine de retomber dans ses « travers » de ruminations sinueuses sur la nature des gens que personne n’a envie de lire.
Ce processus de construction de l’intrigue est particulièrement utile et important avec les livres comportant des retournements de l’intrigue. Les auteurs sont parfois terrifiés par la construction de l’intrigue alors qu’elle repose avant tout sur leurs personnages. Il s’agit plus précisément de définir leurs désirs (apparents) et leurs besoins profonds. Ce sont eux qui font avancer l’histoire et la rendent captivante (voir ci-dessous). En effet quand on ne désire/veut rien, on a aucune raison d’agir et donc pas d’action signifie pas d’intrigue… L’intrigue n’est en effet rien d’autre qu’une série d’actions que le personnage entreprend afin d’obtenir ce qu’il ou elle veut. C’est ce qui est souvent baptisé le « voyage -ou parcours- initiatique » (the « hero’s journey » en anglais) et que Lauren Oliver a nommé le « paradigme des désirs vs. Besoins » (voir ci-dessous).
Construire la trajectoire du roman en partant du coeur de son personnage principal (ses désirs et ses besoins)
Comment construire des personnages crédibles et captivants ? Travailler la psychologie de ses héros
Ecrire est avant tout une histoire de « gens » comme dit plus haut : comment ils agissent, parlent et communiquent. C’est aussi et surtout comment ils ressentent les choses. Et sur ce plan, vous n’aurez jamais un accès plus privilégié à ces émotions qu’en étudiant les vôtres. Vous avez besoin de les comprendre, de réfléchir à ce qui vous motive et ce qui vous effraie, ce qui est source de joie ou de malaise, d’angoisse. Oliver recommande donc de s’engager dans une thérapie ! Et si vous ne pouvez pas vous offrir un psy, prenez du temps pour consigner vos pensées dans un journal ou partager des confidences intimes avec vos amis proches. En bonus, vous serez d’autant plus proche de votre cercle !
Définir les désirs et les besoins de ses personnages
De façon plus concrète, au moment de la caractérisation des personnages, la question majeure à se poser est : quels sont les désirs qui les animent d’une part, et d’autre part leurs besoins (enfouis en eux) ?
Les désirs du personnage (ce qu’il veut obtenir, son but) : Le désir le plus profond de votre personnage est le thème qui va faire avancer l’action : chaque évènement menant de façon organique au suivant. En suivant cette logique, la progression de votre personnage (et donc l’intrigue) se fera alors naturellement et suscitera l’intérêt du lecteur.
Elle dévoile 4 secrets pour déterminer quel « désir » inoculer à ces personnages pour les rendre passionnants :
1/ Ce désir doit être lié à un élément externe, une sorte de preuve concrète qu’il est réalisable.
Par exemple si votre personnage est en quête de l’approbation de son père, une façon plus concrète de l’incarner est de le faire désirer que son père lui confie la reprise de l’affaire familiale, ce qui peut entraîner des actions beaucoup plus spécifiques et une intrigue plus claire.
2/Il doit représenter un enjeu majeur c’est à dire qu’il doit être vu par le héros comme la réponse à tous ses besoins et manques. Il doit donc le vouloir désespérément de sorte à n’y renoncer pour rien au monde. Il ne s’arrêtera pas tant qu’il ne l’aura pas satisfait, ou tant que son monde ne se sera pas complètement écroulé en conséquence de ses actes. Dans The Hunger Games, Katnyss désire ardemment gagner pour survivre, c’est une question de vie ou de mort et dés lors perdre n’est pas une option.
3/Ce désir doit être difficile à satisfaire : les belles histoires reposent sur des épreuves : il faut surmonter de grands obstacles pour évoluer et « grandir » spirituellement. S’il n’y a pas de difficultés, cela devient ennuyeux. Si vous voulez que la trajectoire de vos personnages s’achève dans une sorte de rédemption ou de récompense, ils doivent d’abord traverser une phase sombre et difficile avant de pouvoir atteindre la lumière.
4/Enfin, le personnage doit se tromper lourdement sur son désir, c’est l’aspect le plus complexe de sa construction. Qu’il soit en quête d’un trophée superficiel, d’une gloire imméritée, de popularité ou de la mauvaise personne : toutes ces aspirations doivent sembler idéales au personnage mais n’être en réalité qu’une façade masquant ses vrais besoins. C’est en poursuivant ce désir erroné que le personnage est en mesure d’apprendre ce qui est vraiment important pour lui. Votre personnage principal n’est qu’un humain et sa récompense ne viendra pas de la réalisation de ses désirs mais de la découverte de lui-même et de la compréhension de ses désirs profonds.
Les besoins du personnage : Le principe romanesque repose sur une contradiction avec ses désirs et ses véritables besoins inconscients. Comme exposé ci-dessus, l’intérêt narratif provient des difficultés du personnage à obtenir ce qu’il veut et la récompense n’est pas de satisfaire ses désirs mais de se découvrir et parvenir à comprendre ce que sont nos véritables désirs profonds.
C’est la part la plus intéressante du personnage car complètement souterraine. Si nous savions exactement ce dont nous avons besoin, nous le chercherions, l’obtiendrions et pas de révolution, d’évolution ou de rédemption. La rédemption n’a lieu que lorsque nous exhumons certaines vérités essentielles de notre être, dont nous ne réalisions même pas qu’elles existaient.
Ex : un personnage veut résoudre le mystère de la mort de son frère mais ce dont elle a vraiment besoin c’est de se pardonner cette mort et en enquêtant ellle réalise qu’elle n’est pas responsable (intrigue du roman « Butterflies clues » chez Paper Lantern Lit). C’est la résolution qu’elle espérait depuis le début inconsciemment.
On peut se représenter cette dynamique narrative sous la forme d’un hérisson de vérité qui creuse un tunnel à l’intérieur du personnage. Le personnage n’a aucune idée du labeur que fournit ce petit animal en lui pour déterrer la vérité et atteindre une clarté de jugement. C’est seulement en fin de livre, après avoir épuisé toutes les tentatives possibles pour concrétiser ses désirs, que le personnage touche le fond et se retrouve totalement perdu(e). Tout ce pour quoi il/elle s’est battu et s’est consacré s’avère n’être qu’une chimère. Une construction artificielle sans valeur. C’est la clé de son parcours : parvenir à la dissolution de ses anciennes croyances et poursuites pour parvenir à un état éclairé. C’est à ce moment que notre petit hérissons surgit hors de son tunnel et voit enfin la lumière du jour !
Le personnage peut ainsi aspirer à se marier, retrouver son foyer, arrêter le voyou, embrasser le garçon/la fille, trouver le trésor, etc. Mais il/elle se trompe généralement sur ce qu’il/elle veut vraiment : il/elle pense qu’il veut gagner l’argent du prix mais ce dont il a vraiment besoin c’est affronter la corruption sous-jaçente à la compétition et obtenir justice. Elle pense qu’elle veut toucher l’héritage mais ce dont elle a vraiment besoin c’est évacuer sa culpabilité quant à la mort de son père et finalement trouver l’amour. Le plus on laissera son protagoniste se « planter » totalement dans ce qui est le plus important pour lui, le plus sa nature humaine ressortira : c’est ce qui forme les piliers d’une histoire forte. Et pas d’inquiétudes : la réponse se trouve au fond du personnage tout du long, que vous le sachiez ou non, le hérisson de la vérité chemine souterrainement, attendant que la vie du personnage s’écroule pour émerger.
Outre cette « règle » des désirs et des besoins, Lauren Oliver cite aussi 5 autres caractéristiques à travailler pour trouver la voix de ses personnages et leur donner vie avec le plus de justesse possible : la cohérence de leur comportement, leur historique, leur unicité, leur pouvoir d’identification, leur côté vivant (travail sur les détails sensoriels), leur efficacité et leur spécificité (les petites choses qui définissent leur personnalité).
Ecrire le début et la fin de son roman ?
Commencer un livre, le fameux incipit, est tout un art et pour cela Lauren Oliver recommande d’intriguer le lecteur avec un début surprenant qui donne envie d’en savoir plus et donc de continuer la lecture. Le but est d’amener le lecteur à se poser des questions tout au long du livre de sorte à ce qu’ils doivent poursuivre la lecture pour obtenir les réponses. Quant aux fins, Oliver que les meilleures conclusions sont celles qui bouclent le parcours du personnage de la façon la plus satisfaisante. Cela peut-être triste, heureux ou quelque part entre les deux.
Mais sa préférence va aux fins ouvertes sur de multiples possibilités, de celles qui s’attardent dans notre esprit et prolongent notre immersion dans le monde romanesque du livre, une fois parvenu à la dernière page. Et c’est ce qu’elle a essayé de faire avec sa trilogie Délirium. Les fins ambiguës peuvent ne pas répondre à toutes les questions, mais donner suffisamment d’indices et de pistes pour laisser le lecteur se raconter son propre récit.
Quand à la question de savoir quand mettre le point final à un roman, elle répond que l’auteur le sent au moment il se sent en quelque sorte « gavé » par son histoire comme après un repas de fête, et que vous ne pouvez plus supporter sa vue.
Comment rester motivé/concentré et venir à bout de l’écriture de son roman ? (routine/discipline d’écriture)
Lauren Oliver écrit chaque matin, pratiquement chaque jour de l’année, « produisant » ainsi 1000 à 1500 mots quotidiennement. L’écriture est assez « compulsive » chez elle, dit-elle. A ses débuts, elle devait se forcer pour écrire tous les jours mais désormais c’est devenu une habitude, de même que de se laver les dents. Ne pas le faire serait pour elle aussi « sale » que de ne pas se brosser les dents !, image-t-elle. Cela ne l’empêche pas de rester fidèle à un rituel, celui de la sieste !, qu’elle effectue 2 fois par jour et jusqu’4 ou 5 fois lors des journées « flemmardes ». Pas de musique d’ambiance pour l’écrivain qui « essaie d’écrire dans l’environnement le plus calme possible ». sans musique. Côté logiciels de traitement de texte, elle confie utiliser une combinaison de Scrivener and Microsoft Word. Et enfin elle ne saurait se passer d’une abondante dose de café mais pas de nourriture qui laisse des miettes partout !
Comment trouver le temps d’écrire ?
Saisir la moindre minute libre pour noircir sa page !
Ecrire est difficile et craint souvent. Et à moins de gagner des millions, la plupart des auteurs jonglent entre l’écriture, leur travail officiel, parfois l’école ou encore leurs enfants, et parfois le tout cumulé ! Il y aura toujours d’autres choses concurrentes qui réclameront votre attentions
Mais vous savez quoi ? Chacun d’entre nous, même le plus occupé, dispose de 5 mns ici ou là quand vous êtes seul(e) ou lorsque vous perdez du temps à surfer sur Facebook ou jouer à balancer des volatiles contre des architectures douteuses…
Oliver a elle-même écrit Before I Fall lors de ses trajets de métro entre un travail à temps plein, ses études et un temps partiel le we dans une boîte de nuit. Et parfois dans sa salle de bains ! Elle tapait ses paragraphes sur son Blackberry et se les envoyait ensuite sur son e-mail afin de les assembler et les retravailler sous Word. 200 ou même 40 mots vaut mieux que pas de mots du tout. Si vous avez du temps pour composer ce tweet pathétique, vous avez du temps pour sortir 40 mots.
C’est très difficile de prendre du temps pour écrire en particulier lorsqu’on en tire pas encore de revenu. Ce temps pour écrire arrive en général à la fin de votre liste de choses à faire. Mais ça ne devrait pas… Si vous aimez vraiment écrire, cela devrait faire partie de votre vie quotidienne. Conditionnez-vous pour le faire passer avant tout le reste, excepté aller aux toilettes et manger… Les menus à emporter n’ont pas été créés au hasard ! Prenez le temps d’écrire. Imaginez que vous êtes déjà rémunéré pour cela, et un jour vous le serez vraiment. Elle continue aujourd’hui à écrire un peu partout, étant souvent en voyage ou enchaînant les rencontres et réunions. Et le clavier de son blackberry -sur lequel elle tape aussi vite que son clavier d’ordi- est resté son fidèle compagnon pour cela !
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A lire aussi sur l’édition, la publication d’un manuscrit et l’écriture d’un roman : les conseils d’une lectrice d’édition
Bâtir une intrigue efficace et des personnages forts : conseils d’écriture de Lauren Oliver (Before I fall, Delirium, etc., romans « Young adult »)
Lauren Oliver fait partie de cette nouvelle génération d’auteurs de romans ados dits « young adult » selon l’appellation anglo-saxonne capable de produire des best-sellers à la chaîne avec des univers semi-fantastiques dystopiques et de jeunes héroïnes souvent lycéennes confrontées à diverses épreuves et leçons de vie. Aux côtés de Suzanne Collins (The Hunger Games) et de Veronica Roth (Divergent), elle truste le palmarès des best-sellers du New York Times.
Le premier roman de cette fan des Misérables, Before I fall (Le dernier jour de ma vie en VF), l’histoire d’une lycéenne populaire qui meurt dans un accident de voiture et revivra plusieurs fois d’affilée la journée de cette mort qui lui feront appréhender différemment ses valeurs et changer de mentalité, paru en 2010 sort au cinéma en ce mois de mars 2017. Anecdote amusante : écrit à la petite vingtaine, la jeune femme partageait alors son temps entre 2 jobs et ses études et ne trouvait le temps d’écrire que dans le métro en tapant ses chapitres sur son tél portable ! Elle dit avoir inspiré par sa propre expérience au lycée et « la croyance profonde que personne n’est trop mauvais pour ne pas pouvoir se « refaire », se « racheter » intégralement« .
Dans Delirium, aux réminiscences de Brave New World (Le meilleur des mondes en VF), elle imaginait une ado qui tombe amoureuse dans un monde où l’amour est une maladie baptisée amor deliria nervosa contre laquelle chacun doit s’immuniser. Une particularité intéressante d’Oliver, titulaire d’un master en creative writing de l’université de New-York en et qui a une expérience en tant qu’assistante éditorial chez Penguin, est son implication dans l’aide aux jeunes auteurs dans l’écriture de leurs romans. Elle a même fondé une agence de conseil littéraire (Paper Lantern Lit) qui forme et recrute des auteurs pour développer diverses idées narratives. Un « incubateur » ou « architecte » littéraire selon sa définition. Une vraie petite usine à produire du best-seller en somme (un peu sur le modèle d’Alloy Entertainment qui a notamment développé Pretty little liars dans le même genre ; l’entreprise pratique une sorte d’écriture collective comparable à un pool scénaristique, entre un auteur et une équipe de commanditaires à partir d’un pitch pré-établi, pour produire une série de livres destinés à être adaptés ensuite en série TV ou film)…
En outre très active sur Youtube, elle a lancé une série de vidéos partageant de nombreux conseils d’écriture et sur son expérience d’écrivain. Traumatisée par les premiers rejets de ses manuscrits au motif qu’ils manquaient de « structure » ou d’une « vraie histoire », elle a développé une passion/obsession pour la construction d’une « intrigue » efficace et solide. C’est son expérience dans l’édition qui lui a appris à « raconter une histoire, et pas seulement écrire des descriptions de personnages et de jolies phrases » scande-t-elle d’interview en interview. A l’époque, elle nourrissait d’ailleurs le préjugé habituel contre la fiction jeunesse qui la catalogue comme trop « simpliste » pour être littéraire. Jusqu’à ce qu’elle se décide à apprivoiser l’art de ses intrigues efficaces afin de se faire publier. Sa vision très calibrée, voire formatée ou mathématique, de (ficelles/recettes) l’écriture façon « story-telling » pourra heurter la conception française plus artistique et libre sur ce plan là (même si un Willy -Gauthier Villars-, 1e mari de Colette était précurseur de ses « ateliers » à romans populaires qui ont formé l’auteur des Claudine fin XIXe, début XXe s.). Il n’en reste pas moins intéressant de découvrir voire de s’inspirer de certains de ses « secrets de fabrication » en particulier si on aspire à écrire une oeuvre de ce genre (qu’Oliver défend ardemment, voir sa tribune) :
Conseils d’écriture de Lauren Oliver, auteur à succès de fiction jeunesse « young adult » (Delirium, Before I fall, etc.)
Voici quelques uns de ses -nombreux- conseils d’écriture disséminés sur la toile (voir entre autres sa chaîne Youtube, une mine !) :
Comment trouver l’inspiration ?
Elle recommande pour trouver l’inspiration de rester connecté au monde réel, de lire beaucoup la presse, les faits divers étranges notamment, de façon générale lire beaucoup. Oliver confie qu’elle aime se lancer des défis en partant du sujet d’un article et s’imaginer comment le transformer en histoire ou roman. Autre astuce : éteindre son ipod ! Ecrire est une question de personnes, comment les gens communiquent, se comportent et interagissent. On ne peut apprendre des gens qu’à travers l’observation, donc plutôt que d’augmenter le son de vos écouteurs quand vous êtes dans les transports en commun ou dans la rue, apprenez à écouter autour de vous. Cultivez l’art délicat d’écouter aux portes et d’espionnage des gens tout en prétendant regarder dans le vide. C’est aussi en écrivant que vient l’inspiration, les pensées se nourrissant entre-elles et un fait, une réplique en entraînant un(e) autre.
Exercer son imagination
Lauren Oliver voit l’imagination comme une compétence qui peut être renforcée par l’habitude et à l’inverse s’atrophier, comme lorsqu’on reste avachi sur un canapé. S’abrutir de télévision et de surfs sans fin sur le web lui sont particulièrement nocifs. Il est tellement facile de nos jours de se réfugier dans des mondes déjà imaginés par d’autres dans les livres, films, vidéos Youtube, etc. Mais cela signifie que notre capacité à imaginer
ne travaille plus. Son conseil : couper les écrans, tablettes et ordinateurs pendant une journée pour ressentir cette démangeaison folle et brûlante de « faire quelque chose » parce que la vraie vie est ennuyeuse. Mettez-vous à rêvasser, à fantasmer. Imaginez-vous dans la peau de différents personnages et différents mondes.
Détendre ses neurones !
Oliver constate qu’étrangement la moitié de ses idées innovantes lui sont venues quand elle était à la salle de sport ou au cours d’un jogging. Elle l’explique par la détente cérébrale procurée par ces activités
Le cerveau est habituellement dominé par ses préoccupations quotidiennes comme les factures, les dîner, les problèmes relationnels, les projets futurs. Le fait de se détacher de ses inquiétudes conscientes permette au subconscieny de se mettre à faire fuser les idées
Si vous n’êtes pas fan de la course à pied, vous pouvez essayer le yoga ou le tricot, ou n’importe quoi de manuel/physique et répétitif qui permet à votre esprit conscient de se mettre en pause.
Une bonne douche marche aussi !
Comment vaincre l’angoisse de la page blanche ?
C’est essentiellement une question de discipline qui est clé dans l’écriture d’un livre. Elle insiste sur la nécessité d’écrire un peu tous les jours, de cultiver cette habitude au quotidien, et de refuser toutes les excuses que l’on se cherche pour ne pas s’y mettre. Pour elle l’angoisse de la page blanche est surtout la manifestation d’une résistance naturelle à tout travail créatif et d’écriture. De plus, cette peur advient souvent lorsque l’on ne sait pas vraiment où notre récit est censé aller. Une façon d’y pallier est alors de passer un bon moment à le structurer dans un plan détaillé.
Un autre problème qui doit être surmonté ici est de ne pas laisser sa « voix critique » intérieure prendre le pas sur la voix créative en ne cessant de penser que ce que l’on écrit est mauvais, terrible, que l’on a pas d’idées intéressantes, etc. Il faut alors se rappeler que l’on a pas à écrire quelque chose de « bon » la première fois ou même les 27 premières fois. ce qui compte c’est de jouer avec les mots, la narration, il faut essayer de s’amuser avant tout. Donc, essayer de relâcher la pression et faire taire cette voix critique étouffante est très important dans le processus créatif. Selon Lauren Oliver, mieux vaut toujours écrire quelque chose de mauvais que de rien écrire du tout, car il existe toujours la possibilité d’améliorer et de retravailler ses écrits par la suite. Ceci fait écho à l’adage très juste de Jodi Picoult (auteur de « Il faut qu’on parle de Kevin » entre autres) : « Tu peux toujours retravailler une mauvaise page. Tu ne peux pas retravailler une page blanche » ( « You might not write well every day, but you can always edit a bad page. You can’t edit a blank page. »). En un mot : il faut souvent se « forcer » à écrire, même lorsqu’on est pas d’humeur car l’écriture est comme un muscle qui se développe au fur et à mesure que l’on pratique.
Comment construire une histoire/intrigue solide ?
L.Oliver aime rentrer progressivement dans l’écriture de mes livres. Elle écrit habituellement environ 20000 mots librement afin de faire connaissance avec les personnages et leur univers. Sa méthode d’écriture est assez impressionniste : elle écrit tout un tas de choses de façon éparse sans trop savoir comment elles vont s’imbriquer, ensuite, elle se pose et écrits un plan très détaillé. Sa méthode d’écriture est donc de toujours écrire librement pour s’imprégner du décor et des personnages puis de réfélchir à la structure globale. Pendant la période de révision, elle s’attarde ensuite au niveau micro de chaque phrase en tant que telle qu’elle lit à voix haute et n’hésite pas à couper si besoin. Elle indique ne commencer un roman que très rarement un roman avec un plan précis, mais toujours en élaborer un ultérieurement sous peine de retomber dans ses « travers » de ruminations sinueuses sur la nature des gens que personne n’a envie de lire.
Ce processus de construction de l’intrigue est particulièrement utile et important avec les livres comportant des retournements de l’intrigue. Les auteurs sont parfois terrifiés par la construction de l’intrigue alors qu’elle repose avant tout sur leurs personnages. Il s’agit plus précisément de définir leurs désirs (apparents) et leurs besoins profonds. Ce sont eux qui font avancer l’histoire et la rendent captivante (voir ci-dessous). En effet quand on ne désire/veut rien, on a aucune raison d’agir et donc pas d’action signifie pas d’intrigue… L’intrigue n’est en effet rien d’autre qu’une série d’actions que le personnage entreprend afin d’obtenir ce qu’il ou elle veut. C’est ce qui est souvent baptisé le « voyage -ou parcours- initiatique » (the « hero’s journey » en anglais) et que Lauren Oliver a nommé le « paradigme des désirs vs. Besoins » (voir ci-dessous).
Construire la trajectoire du roman en partant du coeur de son personnage principal (ses désirs et ses besoins)
Comment construire des personnages crédibles et captivants ? Travailler la psychologie de ses héros
Ecrire est avant tout une histoire de « gens » comme dit plus haut : comment ils agissent, parlent et communiquent. C’est aussi et surtout comment ils ressentent les choses. Et sur ce plan, vous n’aurez jamais un accès plus privilégié à ces émotions qu’en étudiant les vôtres. Vous avez besoin de les comprendre, de réfléchir à ce qui vous motive et ce qui vous effraie, ce qui est source de joie ou de malaise, d’angoisse. Oliver recommande donc de s’engager dans une thérapie ! Et si vous ne pouvez pas vous offrir un psy, prenez du temps pour consigner vos pensées dans un journal ou partager des confidences intimes avec vos amis proches. En bonus, vous serez d’autant plus proche de votre cercle !
Définir les désirs et les besoins de ses personnages
De façon plus concrète, au moment de la caractérisation des personnages, la question majeure à se poser est : quels sont les désirs qui les animent d’une part, et d’autre part leurs besoins (enfouis en eux) ?
Les désirs du personnage (ce qu’il veut obtenir, son but) : Le désir le plus profond de votre personnage est le thème qui va faire avancer l’action : chaque évènement menant de façon organique au suivant. En suivant cette logique, la progression de votre personnage (et donc l’intrigue) se fera alors naturellement et suscitera l’intérêt du lecteur.
Elle dévoile 4 secrets pour déterminer quel « désir » inoculer à ces personnages pour les rendre passionnants :
1/ Ce désir doit être lié à un élément externe, une sorte de preuve concrète qu’il est réalisable.
Par exemple si votre personnage est en quête de l’approbation de son père, une façon plus concrète de l’incarner est de le faire désirer que son père lui confie la reprise de l’affaire familiale, ce qui peut entraîner des actions beaucoup plus spécifiques et une intrigue plus claire.
2/Il doit représenter un enjeu majeur c’est à dire qu’il doit être vu par le héros comme la réponse à tous ses besoins et manques. Il doit donc le vouloir désespérément de sorte à n’y renoncer pour rien au monde. Il ne s’arrêtera pas tant qu’il ne l’aura pas satisfait, ou tant que son monde ne se sera pas complètement écroulé en conséquence de ses actes. Dans The Hunger Games, Katnyss désire ardemment gagner pour survivre, c’est une question de vie ou de mort et dés lors perdre n’est pas une option.
3/Ce désir doit être difficile à satisfaire : les belles histoires reposent sur des épreuves : il faut surmonter de grands obstacles pour évoluer et « grandir » spirituellement. S’il n’y a pas de difficultés, cela devient ennuyeux. Si vous voulez que la trajectoire de vos personnages s’achève dans une sorte de rédemption ou de récompense, ils doivent d’abord traverser une phase sombre et difficile avant de pouvoir atteindre la lumière.
4/Enfin, le personnage doit se tromper lourdement sur son désir, c’est l’aspect le plus complexe de sa construction. Qu’il soit en quête d’un trophée superficiel, d’une gloire imméritée, de popularité ou de la mauvaise personne : toutes ces aspirations doivent sembler idéales au personnage mais n’être en réalité qu’une façade masquant ses vrais besoins. C’est en poursuivant ce désir erroné que le personnage est en mesure d’apprendre ce qui est vraiment important pour lui. Votre personnage principal n’est qu’un humain et sa récompense ne viendra pas de la réalisation de ses désirs mais de la découverte de lui-même et de la compréhension de ses désirs profonds.
Les besoins du personnage : Le principe romanesque repose sur une contradiction avec ses désirs et ses véritables besoins inconscients. Comme exposé ci-dessus, l’intérêt narratif provient des difficultés du personnage à obtenir ce qu’il veut et la récompense n’est pas de satisfaire ses désirs mais de se découvrir et parvenir à comprendre ce que sont nos véritables désirs profonds.
C’est la part la plus intéressante du personnage car complètement souterraine. Si nous savions exactement ce dont nous avons besoin, nous le chercherions, l’obtiendrions et pas de révolution, d’évolution ou de rédemption. La rédemption n’a lieu que lorsque nous exhumons certaines vérités essentielles de notre être, dont nous ne réalisions même pas qu’elles existaient.
Ex : un personnage veut résoudre le mystère de la mort de son frère mais ce dont elle a vraiment besoin c’est de se pardonner cette mort et en enquêtant ellle réalise qu’elle n’est pas responsable (intrigue du roman « Butterflies clues » chez Paper Lantern Lit). C’est la résolution qu’elle espérait depuis le début inconsciemment.
On peut se représenter cette dynamique narrative sous la forme d’un hérisson de vérité qui creuse un tunnel à l’intérieur du personnage. Le personnage n’a aucune idée du labeur que fournit ce petit animal en lui pour déterrer la vérité et atteindre une clarté de jugement. C’est seulement en fin de livre, après avoir épuisé toutes les tentatives possibles pour concrétiser ses désirs, que le personnage touche le fond et se retrouve totalement perdu(e). Tout ce pour quoi il/elle s’est battu et s’est consacré s’avère n’être qu’une chimère. Une construction artificielle sans valeur. C’est la clé de son parcours : parvenir à la dissolution de ses anciennes croyances et poursuites pour parvenir à un état éclairé. C’est à ce moment que notre petit hérissons surgit hors de son tunnel et voit enfin la lumière du jour !
Le personnage peut ainsi aspirer à se marier, retrouver son foyer, arrêter le voyou, embrasser le garçon/la fille, trouver le trésor, etc. Mais il/elle se trompe généralement sur ce qu’il/elle veut vraiment : il/elle pense qu’il veut gagner l’argent du prix mais ce dont il a vraiment besoin c’est affronter la corruption sous-jaçente à la compétition et obtenir justice. Elle pense qu’elle veut toucher l’héritage mais ce dont elle a vraiment besoin c’est évacuer sa culpabilité quant à la mort de son père et finalement trouver l’amour. Le plus on laissera son protagoniste se « planter » totalement dans ce qui est le plus important pour lui, le plus sa nature humaine ressortira : c’est ce qui forme les piliers d’une histoire forte. Et pas d’inquiétudes : la réponse se trouve au fond du personnage tout du long, que vous le sachiez ou non, le hérisson de la vérité chemine souterrainement, attendant que la vie du personnage s’écroule pour émerger.
Outre cette « règle » des désirs et des besoins, Lauren Oliver cite aussi 5 autres caractéristiques à travailler pour trouver la voix de ses personnages et leur donner vie avec le plus de justesse possible : la cohérence de leur comportement, leur historique, leur unicité, leur pouvoir d’identification, leur côté vivant (travail sur les détails sensoriels), leur efficacité et leur spécificité (les petites choses qui définissent leur personnalité).
Ecrire le début et la fin de son roman ?
Commencer un livre, le fameux incipit, est tout un art et pour cela Lauren Oliver recommande d’intriguer le lecteur avec un début surprenant qui donne envie d’en savoir plus et donc de continuer la lecture. Le but est d’amener le lecteur à se poser des questions tout au long du livre de sorte à ce qu’ils doivent poursuivre la lecture pour obtenir les réponses. Quant aux fins, Oliver que les meilleures conclusions sont celles qui bouclent le parcours du personnage de la façon la plus satisfaisante. Cela peut-être triste, heureux ou quelque part entre les deux.
Mais sa préférence va aux fins ouvertes sur de multiples possibilités, de celles qui s’attardent dans notre esprit et prolongent notre immersion dans le monde romanesque du livre, une fois parvenu à la dernière page. Et c’est ce qu’elle a essayé de faire avec sa trilogie Délirium. Les fins ambiguës peuvent ne pas répondre à toutes les questions, mais donner suffisamment d’indices et de pistes pour laisser le lecteur se raconter son propre récit.
Quand à la question de savoir quand mettre le point final à un roman, elle répond que l’auteur le sent au moment il se sent en quelque sorte « gavé » par son histoire comme après un repas de fête, et que vous ne pouvez plus supporter sa vue.
Comment rester motivé/concentré et venir à bout de l’écriture de son roman ? (routine/discipline d’écriture)
Lauren Oliver écrit chaque matin, pratiquement chaque jour de l’année, « produisant » ainsi 1000 à 1500 mots quotidiennement. L’écriture est assez « compulsive » chez elle, dit-elle. A ses débuts, elle devait se forcer pour écrire tous les jours mais désormais c’est devenu une habitude, de même que de se laver les dents. Ne pas le faire serait pour elle aussi « sale » que de ne pas se brosser les dents !, image-t-elle. Cela ne l’empêche pas de rester fidèle à un rituel, celui de la sieste !, qu’elle effectue 2 fois par jour et jusqu’4 ou 5 fois lors des journées « flemmardes ». Pas de musique d’ambiance pour l’écrivain qui « essaie d’écrire dans l’environnement le plus calme possible ». sans musique. Côté logiciels de traitement de texte, elle confie utiliser une combinaison de Scrivener and Microsoft Word. Et enfin elle ne saurait se passer d’une abondante dose de café mais pas de nourriture qui laisse des miettes partout !
Comment trouver le temps d’écrire ?
Saisir la moindre minute libre pour noircir sa page !
Ecrire est difficile et craint souvent. Et à moins de gagner des millions, la plupart des auteurs jonglent entre l’écriture, leur travail officiel, parfois l’école ou encore leurs enfants, et parfois le tout cumulé ! Il y aura toujours d’autres choses concurrentes qui réclameront votre attentions
Mais vous savez quoi ? Chacun d’entre nous, même le plus occupé, dispose de 5 mns ici ou là quand vous êtes seul(e) ou lorsque vous perdez du temps à surfer sur Facebook ou jouer à balancer des volatiles contre des architectures douteuses…
Oliver a elle-même écrit Before I Fall lors de ses trajets de métro entre un travail à temps plein, ses études et un temps partiel le we dans une boîte de nuit. Et parfois dans sa salle de bains ! Elle tapait ses paragraphes sur son Blackberry et se les envoyait ensuite sur son e-mail afin de les assembler et les retravailler sous Word. 200 ou même 40 mots vaut mieux que pas de mots du tout. Si vous avez du temps pour composer ce tweet pathétique, vous avez du temps pour sortir 40 mots.
C’est très difficile de prendre du temps pour écrire en particulier lorsqu’on en tire pas encore de revenu. Ce temps pour écrire arrive en général à la fin de votre liste de choses à faire. Mais ça ne devrait pas… Si vous aimez vraiment écrire, cela devrait faire partie de votre vie quotidienne. Conditionnez-vous pour le faire passer avant tout le reste, excepté aller aux toilettes et manger… Les menus à emporter n’ont pas été créés au hasard ! Prenez le temps d’écrire. Imaginez que vous êtes déjà rémunéré pour cela, et un jour vous le serez vraiment. Elle continue aujourd’hui à écrire un peu partout, étant souvent en voyage ou enchaînant les rencontres et réunions. Et le clavier de son blackberry -sur lequel elle tape aussi vite que son clavier d’ordi- est resté son fidèle compagnon pour cela !
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