Publié après sa mort, en 1986, « Mon chien stupide » de John Fante (sous le titre original de « West of Rome), fait partie de ses courts récits non intégrés au cycle « Bandini » dont « Demande à la poussière » est le plus emblématique. C’est une œuvre plus tardive de l’auteur, qui même si elle est encore d’inspiration autobiographique, emprunte un autre ton, plus amer et désabusé que ses œuvres de jeunesse.
Littérature intimiste
Les livres des "choses de la vie", les "fragments de la vie des gens" aux héros névrosés, paumés, losers magnifiques. Attentifs aux détails du quotidien et au désespoir ordinaire qu'ils content avec sensibilité, subtilité voire cruauté ou cynisme... Une littérature puisée au plus profond des êtres. Romans psychologiques et existentiels.
Journaux de Sylvia Plath 1950-1962 : « Je dois me souvenir, c’est de cette matière qu’est faite la littérature, de cette matière de vie remémorée »
Les « Journaux » de Sylvia Plath montrent le lien indéniable entre la vie et l’œuvre de la poétesse et romancière américaine, devenue une icône à la suite de son suicide à l’âge de 30 ans. L’une nourrissant l’autre et vice versa, participant de la fascination qu’elle exerce. C’est ainsi que ses journaux des années 1950 à 1962 (le carnet relatant les dernières années de sa vie jusqu’en 1963 ont été détruits par son mari Ted Hughes) nous offrent une superbe antichambre de son travail de création littéraire et poétique.
De l’inconvénient d’être né de Cioran : « Rien n’est tragique, tout est irréel »
« De l’inconvénient d’être né » de Cioran (décédé en 1995) fait partie de ces livres et auteurs dits inclassables. Michel Houellebecq dont on le rapproche regrettait néanmoins : « Il n’est pas illégitime (…) de souligner ma filiation avec Schopenhauer. Je ne suis pas le seul, j’ai, dans cette lignée, de prestigieux aînés, Maupassant, Conrad, Thomas Mann, par exemple. Et Cioran, auquel je reproche pourtant de n’avoir jamais cité Schopenhauer. »
Thérèse et Isabelle de Violette Leduc, Mémoires d’une jeune-fille brûlante (+ extraits)
Thérèse et Isabelle de Violette Leduc constituait en 1954 le début de « Ravages », roman qui fut refusé par Gallimard, l’année où Histoire d’O, après un semblable refus d’autocensure, trouva refuge chez Pauvert. Ce superbe prélude supprimé parut chez Gallimard, est expurgé et isolé en un précieux petit volume, en 1966, lorsque l’auteur eut acquis quelque notoriété.
« Moi Christiane F., 13 ans droguée, prostituée » : Requiem for a dream…
Moi Christiane F., 13 ans droguée, prostituée, livre culte des années 80, a connu en 2013 une « suite », 30 ans plus tard de la vie cabossée de son anti-héroîne (qui y relate notamment sa «deuxième vie», la gestion de sa célébrité post publication et film, son voyage de promo à New York et autres interactions avec le show-biz jusqu’à sa malheureuse rechute avec l’héroïne et la naissance de son fils, «le cadeau de sa vie»). La fascination pour ce premier opus reste néanmoins intacte: ce roman d’adolescence continue de se lire, sans discontinuer, avec la même ferveur de génération en génération.
Un temps fou de Laurence Tardieu : « Avant j’avais un nom et une vie. Maintenant je marche à côté de vous, très lentement (…). »
Avec « Un temps fou », Laurence Tardieu, lancée sur la scène littéraire française en 2002, et révélée par « Puisque rien ne dure » en 2006, creuse son sillon entre autofiction et récit intimiste. Avec aujourd’hui six romans à son actif, elle explore les blessures de l’être -du deuil impossible d’un enfant aux difficiles relations familiales-, le rapport à la la filiation et les sentiments bien sûr.
« Confession inachevée » (« My story ») de Marilyn Monroe (avec Ben Hecht) : Auto-portrait subjectif de Norma à Marilyn… et d’Hollywood
« Confession inachevée » (« My story ») de Marilyn Monroe (avec Ben Hecht), réimprimé aux U.S en 2000 après une première publication en 1974 (traduit en 2011 en France), le livre court de son enfance dans les années 30 (née en 1926) jusqu’au moment de son show devant les soldats sur le front de la guerre coréenne en 1954. Année également de ses mémoires, rédigées par le scénariste Ben Hecht pour mettre fin aux potins des feuilles à scandale notamment. Elle est alors une star montante, après avoir notamment tourné « Gentlemen Prefer Blondes » (« Les hommes préfèrent les blondes »), « How to Marry a Millionaire » et « Niagara » en 1953. On avait découvert la sensibilité de sa voix à travers la publication de ses écrits intimes en 2010 (« Fragments »), dont on retrouve la force et la justesse frappantes ici. Arthur Miller la définissait comme « portée par une sensibilité lyrique et poétique que peu de gens parviennent à conserver au-delà du début de l’adolescence« . Au milieu de bon nombre de phrases devenues anthologiques, elle dessine autant son auto-portrait que celui d’une époque et du milieu du showbiz. On croyait tout savoir de Marilyn, mais en fait non !
« Valley of the Dolls » de Jacqueline Susann : « It’s a brutal climb to reach that peak (…) You never knew what was really up there… »
C’est en 1966 que Jacqueline Susann publie Valley of the Dolls (« La Vallée des poupées »), qui deviendra un best-seller record vendu à plusieurs dizaines de millions d’exemplaires. En 1967, « La vallée des poupées » est adaptée dans un film éponyme où Susann y fait une brève apparition. Abordant notamment les thèmes de la drogue ou de l’homosexualité, le roman déchaîne les critiques…
« Nicolas Pages » de Guillaume Dustan, Pop(pers) littérature et radiographie de l’identité homo
Il est temps de se remémorer l’oeuvre, « Nicolas Pages » de Guillaume Dustan qui doit se retourner dans sa tombe, alors que le débat sur la légalisation du mariage gay enflamme la place publique, donnant lieu à de tristes manifestations d’opposants… Inconstant, insolent, indécent, trash, anticonformiste, provocateur… autant de qualificatifs employés pour désigner cet enfant terrible des lettres parisiennes: Guillaume Dustan. Tout en s’autoproclamant « l’écrivain l’plus doué d’sa générosité », il déplorait amèrement son manque de visibilité dans les médias. Du moins dans « ceux qui comptent », répétait-il. Mais Guillaume Dustan, décédé à l’âge de 40 ans en 2004 d’une intoxication médicamenteuse, a-t-il été réellement un « oublié des médias » ?
Kitchen de Banana Yoshimoto, Le goût de la vie vient des cuisines…
« Kitchen » de Banana Yoshimoto est un premier roman emblématique de la nouvelle génération littéraire nipponne des années 80, rapidement devenu un best-seller au Japon (vendu à plus de 2,5 millions d’exemplaires). Cette œuvre initiatique est signée d’une jeune japonaise alors âgée de 23 ans en 1988. A la fois onirique, poétique et étrange, il contient d’ores et déjà les thèmes essentiels de l’univers que la romancière développera dans ses romans suivants (moins marquants que ce premier néanmoins): les pulsions de vie et de mort, la solitude et la fragilité émotive à travers les destinées de plusieurs jeunes à l’aube de leur vie d’adulte dans laquelle ils ont bien du mal à s’engager…
Claustria de Régis Jauffret : « Faire pousser une famille dans une boîte, une serre opaque à sept pieds sous terre… »
Jauffret choisit, dans « Claustria » (contraction d’Autriche et claustration), de se faire enquêteur entre roman et investigation. L’ancien rédacteur en chef de « Dossiers criminels » choisit de nouveau un fait divers comme matériau romanesque (après « Sévère » inspiré de l’affaire du banquier Stern en 2010) et fait polémique: l’atroce cas « Fritzl », mêlant inceste et séquestration durant 24 ans en Autriche ayant (d)éf(f)rayé la chronique en 2008.
L’ennui d’Alberto Moravia: « Ce que je désirais en même temps ignorer et connaître, quelque chose qui éveillait en même temps appétit et dégout. »
« L’ennui » d’Alberto Moravia, publié en 1960, 6 ans après Le mépris est un roman également adapté au cinéma notamment par Cédric Kahn avec Charles Berling en 1998 dont l’affiche -racoleuse et moins poétique- a d’ailleurs été reprise sur la couverture du livre*). Il s’inscrit dans la droite lignée du premier, presque comme une œuvre symétrique autour du thème central de la quête de vérité. Et plus précisément la « vérité féminine », ce que l’on appelle couramment le « mystère féminin »…
« Room » d’Emma Donoghue : L’imagination peut-elle sauver de l’horreur ?
ncore méconnue, l’irlandaise et historienne Emma Donoghue est révélée en 2010 à la publication de son septième roman « Room » inspiré des récents faits divers tragiques de séquestration de jeunes filles en Autriche (le cas Natascha Kampusch et l’affaire Fritzl). Lauréat d’une douzaine de prix, ce « roman choc », entre conte noir et thriller, explore une nouvelle fois (après les succès d’une Lionel Shriver « Il faut qu’on parle de Kévin » ou plus anciennement « Le livre de Jérémie » de JT Leroy) une étrange et ambivalente relation mère-enfant
« La cloche de détresse » (« La cloche de verre ») de Sylvia Plath: « Le monde, ce mauvais rêve… »
« La cloche de détresse » de Sylvia Plath retraduit sous « La cloche de verre » (également titre d’un roman d’Anaïs Nin). Roman initiatique, de la fin d’adolescence et de la difficulté à faire des choix sur son avenir mais encore roman sur la condition féminine sur fond d’Amérique d’Eisenhower (baignant dans l’atmosphère trouble des premiers temps du maccarthysme), la condition et la vocation d’artiste, de poète et surtout sur le vertige du vide, de la confusion, la folie, la dépression, le suicide…
« Le monde selon Garp » de John Irving: C’est l’histoire d’un story-teller…
« Le monde selon Garp » de John Irving, publié en 1978 en France, lauréat du National Book Award après trois premiers romans passés relativement inaperçus, révéla son auteur au grand public et inaugura une série de best-sellers (« L’Hôtel New-Hampshire », « L’œuvre de Dieu, la part du Diable » ou encore « Un prière pour Owen »). Dans ce roman culte des années 80, le célèbre story-teller, grand lecteur de Dickens passé par les cours de creative writing de l’Iowa, pose les jalons de ce qui fera son succès : des romans tragicomiques foisonnants sur plusieurs décennies, où le loufoque côtoie l’introspection et les réflexions de société, et où s’enchaînent les péripéties rocambolesques…
Auprès de moi toujours de Kazuo Ishiguro (et présentation de l’adaptation ciné)
« Auprès de moi toujours » de Kazuo Ishiguro réunit les qualités qui ont consacré l’« écrivain britannique japonais » comme il se qualifie: son talent à créer des univers et instaurer des atmosphères prenantes où affleurent nostalgie, réminiscences et mélancolie flottante. C’est ce qui lui a aussi valu le grand succès de « Never let me go » en VO, paru en 2006 en France et sorti au cinéma le 5 mars 2011 (avec Keira Knightley en photo ci-contre, présentation ci-dessous).
Purge de Sofi Oksanen : « Ma petite fille, dans la terre du désespoir poussent de mauvaises fleurs » (Femina étranger 2010)
« Purge », révélation de la rentrée littéraire 2010, signé Sofi Oksanen, finlandaise trentenaire, de mère estonienne, a été couvert de prix en France (Femina, Fnac, Livre Européen) et à l’étranger et affiche un beau succès dans le monde. Au dos de son 3e livre (le 1e traduit en France et 3e volet d’un quartet dont elle écrit actuellement la dernière partie), on peut lire l’éloge de Nancy Huston qui le qualifie de « chef d’œuvre ».
La Brève et Merveilleuse Vie d’Oscar Wao de Junot Díaz : » (…) je ne crois pas aux malédictions. Je crois que seule la vie existe. »
Paru en 2008, « La Brève et Merveilleuse Vie d’Oscar Wao » le premier roman de Junot Diaz, écrivain dominico-américain, né en 1968 (par ailleurs prof de creative writing à New-York), après un recueil remarqué de nouvelles « Los boys » publié en 1996, a connu un buzz retentissant tant côté lecteurs que médias. On acclame sa « prose bouillonnante épique et hilarante » sa « tchache débridée qui met le feu à la langue » ou encore son « explosion verbale étourdissante ». Lauréat du National Book Critics Circle Award et du prix Pulitzer, tout juste sorti en poche chez 10/18, ce roman foisonnant mêle plus ou moins habilement récit intimiste et satire politique…
Le mausolée des amants d’Hervé Guibert : « Un des rôles de la littérature est l’apprentissage de la mort »
L’œuvre d’Hervé Guibert, dont « Le mausolée des amants », reste une influence marquante de la nouvelle génération littéraire, dont Nina Bouraoui est sans doute l’une des voix les plus actives pour la faire connaître. Elle le cite ainsi régulièrement: « Guibert écrit avec ses yeux, avec le corps entier. C’est une littérature sensuelle, voire charnelle. Ce n’est pas un écrivain de l’intime. C’est un écrivain de l’intérieur, c’est-à-dire de la matière vivante. Chaque livre est le livre de la vie. ». De son côté Marie Darrieussecq lui a consacré en 1997 une étude dans le cadre d’un dossier « Le Corps textuel d’Hervé Guibert« . Catalogué « écrivain-homo-sidaique », les livres de Guibert, à l’instar d’un Guillaume Dustan, sont hantés par le corps, source de plaisir et de douleur…
« Aimez-vous Brahms ? » de Françoise Sagan, L’amour au féminin à l’âge charnière de 40 ans
« Aimez-vous Brahms? » de Françoise Sagan a été publié en 1959, alors âgée de 24 ans et quelques années seulement après le succès phénoménal de « Bonjour tristesse » (1954), roman qui reste le plus connu de Françoise Sagan, le charmant petit monstre ne s’est pourtant pas reposé sur ses lauriers. Près d’une vingtaine de romans et nouvelles ont suivi jusqu’en 1996 (à quoi s’ajoutent une quarantaine d’essais, journaux, pièces de théâtre et scénarios) !
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