Brigitte Macron, ancienne professeur de lettre et épouse de notre président, Emmanuel Macron élu en 2017 (qui lui-même cultive des aspirations d’écrivain), a eu l’occasion de s’exprimer à plusieurs reprises sur ses lectures marquantes et auteurs favoris, émaillant aussi régulièrement ses réponses de citations d’auteurs classiques ou de références lettrées. L’exercice de la « bibliothèque » est désormais devenue en effet un incontournable de la fonction politique. Retour sur ses maîtres à penser qui déçoivent quelque peu par leur conformisme au canon littéraire masculin patriarcal français…:
Concernant sa philosophie de vie, Madame Macron se qualifie de « leibnizienne » et pense « qu’il y a toujours un juste équilibre entre le bonheur et le malheur ». Elle ajoute: « Je ne suis pas une optimiste invétérée, mais quand on regarde l’ensemble des choses, le monde n’est pas si mal : « Si tout n’est pas bien, tout est passable », rappelait Voltaire dans « Le Monde comme il va ». Et l’inquiétude nous permet aussi d’apprécier les moments de bonheur. » C’est d’ailleurs le XVIIIe siècle des lumières qui lui correspond le mieux pour la recherche du bonheur qui le domine. Elle cite encore à ce sujet « Le Mondain » de Voltaire et sa vision que « le bonheur est là où je suis » comme sa devise personnelle.
Côté historique, elle confie avoir beaucoup lu sur Jeanne d’Arc dont l’image est souvent erronnée regrette-t-elle: « elle n’est pas la pucelle que l’on croit, cette bergère niaise qui a entendu des voix. C’est une femme guerrière et courageuse, qui valait beaucoup mieux que son Charles VII de roi ! »
Mais la grande passion de Brigitte Macron reste Gustave Flaubert qu’elle compte dans les lectures qui l’ont construites. Plutôt dictatoriale dans ses injonctions, elle va jusqu’à déclarer : « C’est impensable pour moi qu’on ne lise pas « Madame Bovary ». Son écriture est au scalpel. Une fois que chaque mot était pesé, il s’enfermait dans son gueuloir et il criait ses phrases ! « La conversation de Charles était plate comme un trottoir de rue », écrit-il et, en une phrase, Charles est tué, réduit à sa médiocrité. Flaubert est le meilleur traqueur de stupidités de toute la littérature. Il décèle la méchanceté crasse, la sottise partout où elle est. La pièce montée du mariage d’Emma Bovary porte en elle seule l’échec à venir de son union. Tout en Flaubert est signifiant. Mes élèves n’avaient pas le droit de ne pas l’aimer ! J’adorais leur transmettre ma passion. »
Quant à Frédéric Moreau, le héros de l’Education sentimentale elle le voit comme « le champion du ratage, comme beaucoup de héros flaubertiens. » Il serait intéressant de creuser sa vision du « ratage » et de la réussite qui ne semble pas faire dans la nuance 🙂
Côté poésie, sans surprises, elle reste tout aussi classique en citant « le génie de Rimbaud » et « Les Fleurs du mal de Baudelaire » comme livre de chevet dont elle connaît l’ordre par coeur avec une prédilection pour « Une charogne », au centre de « Spleen et Idéal », puis « Tableaux parisiens », « Le Vin », « Les Litanies de Satan » dans « Révolte ». Elle est sensible à sa « fascination pour la chute » et la façon dont « les poètes savent dire l’indicible« .
Maupassant est aussi un autre pilier de son panthéon littéraire par l’omniprésence de la mort dans son oeuvre qui a aussi marqué sa vie très jeune après la perte d’une soeur puis d’une jeune nièce. Elle explique : « Je suis comme lui… Dans « Bel-Ami », à la veille d’un duel, le héros ne pense pas en réchapper, il se voit déjà mort le lendemain. Cette terreur de la mort, je l’ai toujours connue. »
(Source : Interview Elle, 2017)
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