« L’écrivain algérien de langue française » Yasmina Khadra s’est installé, depuis 30 ans, durablement et confortablement dans les librairies francophones avec ses romans épiques autour des thèmes de la guerre et du terrorisme. A l’occasion de la sortie de son nouveau roman, « Les anges meurent de nos blessures » qui raconte le destin tragique d’un boxeur dans l’Algérie des années 30, et alors qu’il vient d’annoncer sa candidature à l’élection présidentielle algérienne, il revient sur son choix de la langue française comme langue d’écriture, bien qu’elle ne soit pas sa langue maternelle :
Il explique plus précisément que c’est la lecture de Camus qui l’a incité à s’engager dans la langue française : « Adolescent, je voulais devenir poète, le meilleur véhicule était l’arabe. Le français passait au second plan, puis j’ai découvert L’Étranger de Camus. Je me suis rendu compte que l’érudition n’était pas dans la complexité, mais dans la fluidité, la simplicité. Un grand écrivain peut exprimer les choses les plus fortes de la manière la plus accessible possible. J’avais quatorze ans, et je me suis intéressé au français, et du
même coup au roman. Depuis, cette langue me permet d’avancer, de m’enrichir. Elle me donne les moyens de m‘exprimer plus largement que la langue arabe. Avec le français, je suis en transe, dans la fête, j’ai beaucoup plus de liberté. »
Pour autant il se distingue d’une certaine littérature française contemporaine à qui l’on reproche souvent son « nombrilisme » pour cultiver les grandes fresques romanesques. A ce sujet il commente : « Chacun vient avec son bagage, sa vision des choses. Moi, j’ai toujours adoré les grands récits, toujours essayé d’être à la hauteur des enseignements que m’ont prodigués les écrivains russes, Gogol, Dostoïevski, ou américains, John Steinbeck et Jack London. Ils m’ont permis de traverser des moments de turbulence dans ma vie, et d’être moi-même. »
2 Commentaires
Yasmina Khadra est un des meilleurs auteurs français actuels, peut être le meilleur, il aurait tort de se gêner.
J’ai une profonde admiration pour cet auteur. En effet, il est, sans doute, l’un des rares algériens à avoir compris la subtilité des liens entre européens et arabes ou kabyles pendant la si triste période de ce que fut la guerre d’Algérie. Je suis plus âgé que lui, étant né en 1943, à Blida la ville des roses. Mon meilleur copain en classe de philo à Duveyrier devenu Ibn Rosch était kabyle et nous parlions librement de nos points de vue au sujet de la lutte de ce qu’il appelait la guerre de libération. J’ai retrouvé ce type de relations dans » Ce que le jour doit à la nuit ». Y sont décrits différents types de ce que l’on a appelé (tardivement d’ailleurs) les pieds-noirs et leurs voisins ou amis musulmans. Bravo à ce magnifique auteur! Comme il est agréable d’entendre parler avec tant de justesse de ses habitants passés et présents. Merci, Mohammed!